Maquettes Ferroviaires
et Collections


La Saga Jouef


Chapitre 3, 1963-1965 : L’entrée fracassante
dans le monde du modélisme



Le tournant de l’histoire de Jouef se situe sans doute en 1963 lorsque la marque de Champagnole sort sa nouvelle gamme de wagons de marchandises à deux essieux. L’article du reportage sur les nouveautés de la foire de Nuremberg dans le Loco Revue de mars 1963 stipule « C’est une rame de choix qui classe définitivement Jouef dans la catégorie modèle et pour un prix défiant toute concurrence, selon les règles de la maison » . En effet, le wagon transport de ciment est proposé à 2,5 Francs (3,3 Euros) contre 6 Francs (8,3 Euros) pour le modèle identique du concurrent de HOrnby-acHO. Avec l’adoption de l’attelage international, Jouef marque aussi sa volonté de s’adapter au monde du modélisme. Cet élan se poursuit en 1964 avec une locomotive diesel BB6700 très finement réalisée à l’échelle, suivie en 1965 d’un véritable raz de marée de nouveautés concernant le matériel moteur (CC40100, BB1300, autorail Picasso) et remorqué (poursuite de la série des wagons à deux essieux, rame voyageur TEE inox Paris-Bruxelles-Amsterdam). Cette période représente trois années de bataille et de concurrence acharnée avec HOrnby-acHO, son adversaire direct sur le marché en forte croissance du train miniature en France. Alors que la firme du groupe Meccano est en 1965 confrontée à ses premières alertes avec le rachat par le groupe Anglais Triang, l’avenir est radieux pour Jouef qui poursuit sa croissance en s’imposant sur ce nouveau segment pour elle qui est celui des modélistes ferroviaires tout en conservant un quasi monopole sur celui du jouet.

La série par laquelle Jouef est réellement entré dans le monde du modélisme ; les premiers wagons à deux essieux sur châssis court, qui sont commercialisés en 1963. Ils auront une très longue descendance sur plusieurs décennies. La vapeur 020T du coffret « Electric Trafic » commence à dépareiller à coté de cette série, mais Jouef l’utilisera longtemps encore pour conquérir les tout jeunes adeptes.

Sur mon réseau collection, les productions Jouef de la période 1963-1965 font maintenant bonne figure, même si elles ne sont pas toutes à l’échelle exacte. Le parc de matériel remorqué se complète avec le fourgon CIWL. Les voitures type Forestier s’améliorent dans leur niveau de détail alors que le parc traction se complète et se modernise. Autour de la locomotive à vapeur 231C bien connue, l’autorail 300cv, la BB diesel 6700, et les motrices électriques BB 9200 et 1300 sont des unités très modernes au sein de la SNCF de l’époque qui seront très bien accueillies par les amateurs.

Après les wagons à deux essieux sur châssis courts de 88mm, Jouef complète à partir de 1964 la série avec un châssis de 107 mm, pour encore mieux attaquer sont rival direct HOrnby-acHO avec une large gamme vendue à des prix défiant toute concurrence. Cette série fera un tabac dans le petit monde des modélistes.

Qui aurait pensé au cours des années 50 voir les modèles de Jouef figurer sur des installations réalistes et de haut niveau ? Il faut se rendre à l’évidence, les modèles de la marque de Champagnole constituent une excellente base de super-détaillage pour de nombreux amateurs de cette époque, comme cette 231 C qui retrouve ses couleurs d’origine de la compagnie du Nord et qui est ainsi digne de tracter les voitures RMA de la même époque, d’avant 1938, date de création de la SNCF.

Sur la période 1963-65, la volonté de Jouef est de coller à l’actualité des nouveautés ferroviaires, et cela se traduit notamment par la reproduction de la très moderne rame TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam, tout comme celui de la BB 6700 à l’avant plan.

C’est une avalanche de nouveautés qui est proposée aux amateurs entre 1964 et 1965 avec 6 locomotives et 5 voitures plus des assortiments de coffrets variés, faits pour cibler une clientèle plus régionale comme le « Thionville Trafic » ou le « Alpenrose ».

En complément du matériel roulant, Jouef passe des accords avec la firme Allemande Pola pour offrir aux amateurs français une gamme complète de bâtiments leur permettant de composer des décors comme des villages ou ici, une usine de concassage. Toutefois, cette série, très typée « allemande » aura un succès mitigé.

Pour répondre à sa politique des prix les plus bas possibles, Jouef table sur une production de masse en multipliant ses unités de production, mais en leur conservant une taille humaine et intégrée au sein des bourgs Jurassiens. Ici l’usine de Foncine-le-bas similaire à celles de Foncine-le-haut, Champagnole ou Sirod. Beaucoup de montages s’effectuent chez l’habitant, Jouef fournit du travail à domicile dans de nombreuses maisons des villages alentours. Noter le camion avec sa remorque décorée du petit bonhomme dessiné par René Letourneur, que nous connaissons bien sur nos catalogues.

Bien sûr, elle est beaucoup trop petite cette usine d’origine Vaupe pour être réaliste. Je l’avais assemblé il y a fort longtemps, vers l’âge de 13 ans et je profite de cette rubrique pour la ressortir après une petite restauration. L’occasion était bien trop belle de pouvoir y ajouter la raison sociale de Jouef sur son toit. S’agit t- il de Foncine-le-bas, de Foncine-le-haut ou d’une autre unité ? Seuls les dieux du modélisme le savent. En attendant c’est peut être Georges Huard, en costume cravate que l’on voit se diriger avec son épouse vers le parking au centre de la photo. Cette belle Citroen DS jaune, n’est ce pas son véhicule de fonction au sein de la société « Le Jouet Français » qu’il a fondé ? Et toutes ces caisses frappées du symbole « Fragile » c’est sans doute les cadeaux de mes heureux Noëls des années 60. Ainsi la boucle est bouclée entre rêve et réalité. Notez les véhicules Micro-Norev très kitchs avec leurs roues rouges à pneus blancs et leurs couleurs chatoyantes. Pour réaliser ce petit diorama, tout début des années 70, j’avais utilisé des éléments de mes premières voies Jouef en profilé laiton, ce qui ici retrouve toute sa justification.

La Vie du Rail N° 1025 Spécial Noël du 19 décembre 1964 consacrait 5 pages à Jouef. L’on découvre ici le très beau bandeau de début d’article illustrant le rôle important des usines alimentant directement la hotte du père Noël.

Ce numéro de la Vie du Rail nous permet d’effectuer une visite complète des usines Jouef. On y retrouve d’intéressantes photographies sur lesquelles on découvre la peinture et le stockage des autorails Picasso ou des caisses de CC 40100, ainsi que la sérigraphie des bandeaux des voitures TEE.

Le dynamisme de la firme s’exprime dans sa célérité à commercialiser dès 1965 la CC 40100, moins d’un an après sa mise en service à la SNCF. Alors que HOrnby-acHO en est seulement à envisager de reproduire la CC7100 des records de vitesse de 1955 (que Jouef reproduira d’ailleurs aussi), la marque de Champagnole veut coller à l’actualité avec un symbole d’un design avant-gardiste signé Paul Arzens.

L’ère de l’attelage international s’ouvre en 1963

Le catalogue Jouef de 1963 fait la part belle au petit Bonhomme de René Letourneur qui maintenant actionne un aiguillage de la gamme New Rail. Sur la couverture arrière du catalogue, la nouvelle brochure de plans de réseaux est mise en valeur.

Devenir l’équivalent des grandes marques de trains miniatures est un leitmotiv pour Jouef. Dernière étape de la normalisation, après la gamme des New Rails, le passage de 6V à 12V de l’alimentation électrique; l’abandon de l’attelage Jouef à croc pour adopter l’attelage dit « international » qui est en fait l’attelage à boucle mis au point par Märklin pour ses modèles avant guerre. Pour écouler le stock des anciennes boîtes, une étiquette « accrochage international » est collée. Puis la mention « attelage international » est imprimée sur les nouvelles boites. Ainsi donc, on peut inclure des wagons Jouef dans une rame des marques VB, SMCF, Märklin, Rivarossi, Lima, Liliput ou de bien d’autres marques encore.

La série des wagons à deux essieux réalistes et abordables. Ou comment attaquer le grand frère HOrnby-acHO

Illustrés dans le catalogue Jouef de 1963 les nouveaux wagons de marchandises. Avec quatre types différents et six modèles, la série des deux essieux démarre en trombe. Tous ont un châssis de 88mm de longueur, mais celui du transport de ciment est spécifique avec la reproduction du bas des silos.

La citerne pour produits pétroliers débute une longue carrière et elle sera déclinée dans de nombreuses décorations. La toute première référence 640 est tout au début uniquement décorée de l’inscription Algéco. Elle sera ensuite complétée d’une décalcomanie aux couleurs de la British Petroleum. Noter, sur le wagon au premier plan, le bouchon du réservoir ouvert qui permettait, en théorie, le remplissage de la citerne. Dans ma jeunesse, sur mon exemplaire reçu à Noël 1964, j’utilisais souvent cet avantage.

Deuxième version de la citerne, le transport de vin réf 641. La version d’origine, en 1963, est livrée avec une citerne jaune aux couleurs de la SWRN. Dès 1964 elle change de couleur et de raison sociale pour une décoration aluminium aux couleurs de « Vins du Postillon ». Cela respire bon la France profonde, pays du vin par excellence.

Il n’y à guère, en 1963, dans la gamme Jouef que la 231 C qui est digne de tracter les wagons de la nouvelle gamme à deux essieux. Même si c’est à la base une machine de vitesse, elle s’acquitte avec brio de cette tâche. Sur cette photo, les quatre premiers wagons de la rame sont des de transport de vin.

Autre transporteur de vin, le bi-foudre en bois référence 643. J’en connais deux versions de cette époque, l’une avec une décoration C.W.F.B et l’autre Vins du Postillon.


Le plat à ridelle basse est décliné avec deux chargements. Des tuyaux gris sous la référence 644 et des conteneurs appelés cadres à cette époque sous la référence 645. Les cadres sont de couleur grise en 1963. A partir de 1966 ils seront jaunes, décorés aux couleurs du déménageur Bailly, sous la référence 645b. Ces wagons sont très finement décorés avec des inscriptions exactes. Notez les couleurs brunes différentes des deux références.

Sans doute le plus beau de la série et le plus détaillé, le transport de ciment référence 642. Il dispose de tous les détails, passerelle, rambardes d’extrémité, mains montoires. Sur ce cliché, comparaison des deux modèles concurrents ; Jouef et HOrnby-acHO. Certes la présentation du modèle Hornby est plus flatteuse, mais elle ne justifie pas un prix multiplié par 2,4. Meccano cassera ses prix pour tenir tête à Jouef et c’est sans doute ce qui provoquera sa perte.

Des wagons dits « fonctionnels » font leur apparition.


L’illustration sur le catalogue Français de 1963 des wagons fonctionnels est sobre, mais il décrit en détail les possibilités d’animation. Pour ce qui est de l’interception et du largage des colis postaux, cette technique n’était utilisée qu’en Angleterre, et pas en France, ce qui fait que dans notre catalogue Jouef national, elle faisait figure de curiosité.

Le curieux wagon poste Royal Mail conçu pour Playcraft

Avec le Royal Mail, Jouef inaugure une nouvelle série dite « fonctionnelle » destinée à élargir les possibilités de jeux. Ce modèle est spécialement créé pour Playcraft car, en Angleterre, ce type de wagon est un grand classique. Ce fourgon est destiné à compléter la rame British Railways qui a pourtant déjà disparu du catalogue Français en 1963 après une très courte carrière d’une année.

Le Royal Mail est dans son élément sur cette illustration en couleur du catalogue Playcraft de 1963. A noter qu’une version non fonctionnelle est disponible en Angleterre, elle ne le sera pas en France.

Le dispositif est en place avec le quai spécial avec sa potence au bout de laquelle est suspendue le conteneur. En amont, le réceptacle destiné à recevoir les colis postaux. Sur la voie les deux cames d’ouverture et de fermeture du dispositif fonctionnel de la voiture Royal Mail présenté en avant-plan. Mais n’oublions pas que nous sommes en Angleterre à l’époque de l’affaire du train postal, ce qui a entraîné la mise en œuvre d’un important dispositif de sécurité avec des policiers FR qui, eux, sont bien Français.


Alors que les gendarmes sont sans doute en planque, le train postal s’approche du dispositif tracté par le diesel North British qui est toujours au catalogue Jouef jusqu’en 1964 sous la référence 837. Le colis postal est installé sur la potence. Notez le mode d’emploi détaillé imprimé au dos du couvercle de la boîte du wagon Poste Royal Mail.

1) Le fourgon postal passe sur la came d’ouverture, le panier latéral se déploie. Si le wagon contient un colis postal, il est largué dans le réceptacle du quai.
2) Le panier s’approche de la potence. Le colis va glisser le long de la tige
3) Pour choir en douceur dans le panier sous l’œil des responsables du quai postal
4) En passant sur la deuxième came, le panier se ferme, le colis est embarqué. Il sera re-largué au prochain tour de circuit et un autre raflé, si le joueur veut poursuivre ce singulier ballet.

Avec le wagon poste Royal Mail fonctionnel, Jouef veut s’attaquer aux concurrents de Playcraft sur le marché anglais qui disposent presque tous d’un modèle du même type opérationnel comme illustré ici sur le catalogue Hornby-dublo de 1962. Notez la grue Breakdown qui sera disponible en importation en France dans le catalogue HOrnby-acHO jusqu’en 1964 (voir ma rubrique de SMCF à HOrnby-acHO). Plus tard, en 1966, Jouef sortira aussi sa grue fonctionnelle, mais ce sera un modèle Cockerill Français.

L’autre élément fonctionnel ; le wagon-trémie

En 1963 apparaît une version fonctionnelle du wagon-trémie brun VB à gauche. Plus tard, en 1964, une version grise décorée au nom de la société Arbel le remplace. Un chargement de granulés plastique beige ou noir représente soit le ballast, soit le charbon. Un rail spécial est joint aux coffrets, destiné à écarter les trappes sous le wagon et permettre le déchargement par gravité des granulés.

Le catalogue Playcraft de 1963 illustre en couleur ce qui est appelé « opérating hopper wagon set » dans la langue de Shakespeare.

Avec ce wagon, Jouef joue dans la cour des grandes marques allemandes comme Fleischmann ou Vollmer qui présentent aussi ce type d’accessoire très ludique et à la mode, comme on l’aperçoit sur ces catalogues ou revues.

Toujours dans la Vie du Rail spécial Noël 1965 on aperçoit sur la photo de droite un essayeur qui teste chaque wagon-trémie. Comme quoi le contrôle qualité n’était pas laissé au hasard chez Jouef. Sur l’image de gauche, le travail d’assemblage à domicile, une spécialité de Jouef dans la tradition Jurassienne.

Le wagon-trémie Arbel donnera naissance à un coffret assez rare chez Jouef car produit une seule année ; le « Thionville trafic » en allusion à la fameuse vallée sidérurgique de la Fensch, proche de cette ville. Le coffret comprend une BB 1300 et 3 wagons Arbel, mais dans une version non fonctionnelle. Il est probable qu’une version fonctionnelle du coffret était prévue car l’emplacement pour le rail spécial existe dans l’insert plastique du coffret, mais, à ma connaissance, une telle version n’a jamais été commercialisée.

Croisement de rames composées des deux types de wagons-trémies sur mon réseau collection. Nous sommes dans les années 60, proche de Thionville, Hayange ou Florange à l’époque florissante de la sidérurgie Française.

La série des wagons à boggies Diamond poursuit sa carrière en boîte individuelle

Vendue maintenant en boîte individuelle, la série des marchandises à boggies Diamond poursuit sa carrière, équipée de l’attelage international. Le modèle contenu dans la boîte est illustré sur une face, tandis que sur l’autre, l’ensemble de la gamme est présenté. Au passage, le tombereau change de couleur pour passer du vert au brun à partir de 1963.

La SNCF va se fournir en ballast pour ses voies dans une carrière proche de ses emprises ferroviaires. Sur ce cliché, l’usine de concassage est d’origine Pola, mais commercialisée en kit par Jouef à partir de 1965. Elle était équipée d’un réservoir à granulés et d’un électro-aimant permettant le chargement à distance des wagons. Ce bâtiment est très ancien dans ma collection, j’ai dû le recevoir vers 1966/67. Je l’ai ici remis en scène pour ce cliché après un dépoussiérage et une petite restauration. Le petit train de chantier Egger-Bahn, né en 1963 fait la liaison avec la carrière, comme j’aurais aimé qu’il le fasse lorsque j’avais 8 ans.

L’apparition de la version fonctionnelle du wagon-trémie entraîne la modification des moules du châssis. En fait, sur la version normale, les trappes existent, mais sont condamnées fermées par une petite pièce en plastique collée. Seuls les deux bras de commande sont absents.

De nouveaux accessoires apparaissent

En 1963 apparaissent trois types de nouveaux accessoires comme on le voit sur ce cliché ; le passage à niveau fonctionnel, les éléments de pont et la remise double ou quadruple démontable.

Le dépôt des machines à deux ou quatre voies

Les remises illustrées sur le catalogue 1963 à gauche et 1964 à droite. Sur ce dernier, la version à quatre voies n’est plus schématisée, mais correctement illustrée. Point commun, la présence d’une ou plusieurs 231C et du curieux diesel Britanique type 2D6100.

Pour votre plaisir, j’ai reconstitué la scène du catalogue 1964 sous l’objectif de mon appareil photographique. La remise existait en deux couleurs; grise comme le modèle monté ou rouge brique comme la version en boîte à gauche.

Mise en scène réaliste de la remise à quatre voies, comme le catalogue 1964 Jouef aurait pu en comporter. On retrouve les acteurs habituels que sont les vapeurs 231C (au nombre de trois cette fois) et le diesel Britannique.

Sur le catalogue Playcraft 1963, la remise est illustrée en couleur dans sa version couleur brique (style anglais oblige) A noter que le caractère fonctionnel des cheminées est mis en avant par un schéma à gauche en haut. Pour mettre en œuvre cette propriété, il faut déjà disposer de locomotives équipées de dispositifs fumigènes qui ne figurent ni au catalogue Jouef, ni au catalogue Playcraft.

La mise en œuvre du dépôt à quatre voies nécessite un important faisceau de voies et d’aiguillages, qui n’est pas toujours facile à placer sur un petit réseau. C’est sans doute pour cette raison que la version à deux voies sera beaucoup plus vendue que la version 4 voies, qui restera souvent invendue chez les marchands de jouets.

Autre vue du dépôt Jouef à 4 voies avec du matériel roulant plus moderne. Les accessoires comme la grue à eau, le parc à charbon ou la sablière sont de Kibri et de Vollmer, Jouef ne commercialisant pas encore ces accessoires (hormis un parc à charbon d’origine Pola à partir de 1965).

Les éléments de pont et passage supérieur

L’illustration pleine page du catalogue Jouef 1963 met largement en valeur les nouveaux éléments de pont. La troisième dimension est créée pour les réseaux de trains miniatures, et de manière ludique, à la manière d’un jeu de construction avec des éléments comme les piles ou les tabliers qui s’assemblent. Noter le matériel roulant utilisé pour l’illustration, ce sont des productions 1962 encore équipées de l’attelage jouef à croc. L’on retrouve des modèles anglais avec la rame diesel voyageurs des British Railways et la vapeur 020 frappée de l’écusson de la compagnie anglaise sur sa caisse à eau. Ce sera une des rares fois où ce matériel aura l’honneur d’apparaître dans les catalogues Français de Jouef.


Reconstitution pour la circonstance des illustrations du catalogue Jouef 1962 avec au fond la boîte référence 673. En 1963, seuls les éléments de tablier en voie droite étaient disponibles, ce qui nécessitait une grande longueur pour réaliser un passage supérieur. Les éléments de pont existaient en deux couleurs ; gris foncé comme utilisé ici et gris très clair, couleur béton identique à celle des piles de pont.

Un passage à niveau à commande électrique à l’image des grandes marques

Illustré sur le catalogue Jouef 1963, le nouveau passage à niveau électrique référence 676 et son rail de passage référence 677. Les moteurs étaient logés dans deux petites buttes attenantes aux barrières qui n’étaient pas faciles à intégrer au paysage.

Le passage à niveau est dans les années soixante omniprésent sur les routes françaises. A l’époque, il fait vivre des milliers de garde-barrière, métier disparu de nos jours avec les passages à niveaux automatiques. Pour exercer ce métier, souvent dévolu aux épouses des cheminots, il faut vivre sur place dans les maisons dites de garde-barrière attenantes. Chaque marque de cette période tient à reproduire, souvent de manière animée, cette caractéristique essentielle de l’interférence entre le rail et la route. L’on découvre de gauche à droite, les modèles des marques Disque Rouge, Märklin, Kibri, et HOrnby -acHO. A l’avant-plan, le passage à niveau Jouef installé laisse passer des modèles de véhicules Micro-Norev de la même époque. La maison de garde-barrière est de fabrication André Porte, marque qui sera intégrée à la gamme Jouef à partir de 1966.

En 1963, les passages à niveaux sont livrés dans une boite compacte illustrée à gauche. Elle se révèlera sans doute mal adaptée aux fragiles barrières et un nouvel emballage à droite fût conçu. Remarquez le marquage central de la route de couleur jaune, ce qui était la règle à l'époque. Moulés en relief, sur les versions suivantes, il ne sera plus peint.

Le prima-transfo ; une curieuse alimentation économique.

Pour alimenter les réseaux de début, Jouef propose une solution intermédiaire entre le transformateur disjoncta (relativement onéreux à l’achat) et l’alimentation à pile (peu durable). Il s’agit du Prima transformateur référence 887, une alimentation rustique pourvue d’un variateur entre 9 et 12V et se branchant sur secteur. Pour l’inversion du sens de marche, un élément de voie spécial est vendu à l’unité sous la référence 470 A Inv ou joint dans les coffrets de départ. Il suffit de déplacer les pattes d’alimentation pour inverser le sens de marche. Simple, mais efficace ? Non !

En 1964, Jouef poursuit son évolution en s’attaquant au circuit routier

Le catalogue 1964 annonce la couleur, un France comme dans le monde : la mode est au Slot Car, jeu de course voitures électriques. Avec le train électrique, ce sont les deux passe- temps favoris des baby boomers. Jouef veut profiter de ce nouveau marché et lance le Record 64 cette même année comme le montre le catalogue.

A l’intérieur du catalogue, le petit bonhomme Jouef de René Letourneur s’est paré du drapeau à damier pour faire la part belle au jeu de circuit routier, déjà très complet.

La révolution se poursuit avec la BB 67000

Cöté trains, relativement peu de nouveautés, mais une motrice marquante, la BB 67001 qui marquera un tournant décisif dans l’évolution de Jouef. Voici l’illustration du catalogue 1964 qui présente les caractéristiques détaillées du modèle réel de la SNCF et de sa reproduction par Jouef.

Carrosserie détaillée et finement gravée, mains montoires rapportées, bandes décoratives bleue et blanche, tampons, phares et écusson SNCF rapportés, le modèle Jouef fait preuve d’un niveau de perfectionnement jamais atteint par ce constructeur. A noter, sur les premiers modèles, l’enjoliveur en métal chromé rapporté qui disparaîtra plus tard. La BB6700 est ici illustrée avec la nouvelle version de la BB 9200 électrique qui réutilisera son châssis à quatre essieux moteurs à partir de 1964.

Sous la référence 841, la BB n’est pas équipée d’éclairage lors de sa sortie en 1964. Trois phares chromés opaques sont montés à l’emplacement des feux à l’avant et à l’arrière. En 1965, l’éclairage sur un côté apparaît sous la référence 841 E. Plus tard, sous la référence 8411 un éclairage réversible avant-arrière sera installé comme illustré ici dans le catalogue 1973. La BB 6700 entame une longue carrière, faite d’évolutions multiples.

La BB 6700 apporte une note de couleur et de modernisme dans les dépôts encore largement peuplés de locomotives à vapeur en 1964. Son esthétique est due au célèbre styliste de la SNCF Paul Arzens.

Les grilles de ventilation latérales ont une gravure ajourée qui permet de voir la mécanique intérieure et de jouer un réel rôle de refroidissement du moteur. Une première en modélisme à cette époque. Inconvénient de cette belle BB 6700, elle est très bruyante en fonctionnement et les grilles ajourées y sont sans doute pour quelque chose.

Croisement sur mon réseau-collection d’une BB 6700 avec une BB 9200 nouvelle génération équipée du même châssis.

Jouef sort en 1964 un coffret dénommé « Alpenrose » avec la BB 6700 et des voitures CIWL lits et salon. Sans doute, le nom fait-il allusion aux trains de voitures-lits menant aux Alpes pour les sports d’hiver.

Un deuxième locotracteur diesel apparaît

Le locotracteur Y51132 apparaît en 1964 sous deux références : 802 pour la version à 4 roues motrices et 840 B pour une version plus économique à deux roues motrices seulement avec une transmission simplifiée.

Comme les autres motrices, le locotracteur sera équipé de l’éclairage avant à partir de 1965 sous la référence 840 E. Notez sur mon modèle le tampon ajouté « fabrication 1966, lampe incluse » .

La 231 C se pare de la livrée Chocolat et poursuit sa carrière

A partir de 1963, la Pacific 231C adopte une livrée couleur brune dite « chocolat », sans doute pour évoquer sa livrée d’origine avant 1938, lorsqu’elle appartenait encore à la compagnie du Nord. C’est un curieux retour sur le passé. Le coffret Orient Express évolue de la même manière avec cette locomotive.

De nombreux amateurs de l’époque s’ingénieront à améliorer la Pacific Jouef qui constitue une bonne base de départ comme ici, la reproduction d’une version Nord fidèle avec son embiellage complété qui se retrouve digne de tracter une belle rame de voitures CIWL Rivarossi très fidèles. A l’arrière-plan la version verte de la Pacific 231C Jouef qui suivra la version brune à partir de 1965. Elle existera d’abord sans filets décoratifs rouges, puis avec, comme sur ce cliché.

Une rame réaliste 100% Jouef avec la Pacific Nord super-détaillée tractant le Nigth Ferry composé de voitures-lits type F spécial Paris-Londres au gabarit ferroviaire anglais pour pouvoir franchir la Manche.

De retour au dépôt après avoir tracté le Nigth Ferry, la Pacific 231C Jouef super-détaillé fait bonne figure au milieu de matériels plus sophistiqués de marque HOrnby-acHO ou TAB.

La nouvelle version de la BB 9201 affiche ses pantographes articulés

La BB 6700 étant passée par là, Jouef adapte son châssis à une nouvelle version de la BB 9201 qui, tout en conservant son numéro de référence 833, se métamorphose totalement. La carrosserie est entièrement nouvelle et sa longueur passe de 170mm à 185mm, ce qui se rapproche de la réalité. Elle est finement gravée avec, comme sur la BB 6700, des persiennes de ventilation ajourées. Les tampons sont rapportés ; au début ils sont peints en blanc. La ligne de toiture n’est pas rapportée en 1963, bien que les emplacements des isolateurs soient gravés dès le départ. Le niveau de réalisme est toutefois en retrait par rapport à la BB 6700 car les mains courantes latérales ne sont pas rapportées et surtout, les bogies ne sont pas conformes. Les pantographes sont d’un nouveau type, extensible mais non fonctionnel. Ils feront une longue carrière chez Jouef dans différentes versions.

La fausse nouveauté est ici illustrée sur le catalogue 1964 de Jouef. Le dessin reproduit les bogies de l’ancienne version de 1963 et non ceux de la BB6700 que la BB9201 emprunte dans sa nouvelle configuration.

Les bogies sont empruntés au modèle diesel 6700 par économie d’outillage. Ils sont trop courts et ne reproduisent pas le type Jacquemin des BB 9200 possédant un empattement plus long. On voit sur ce cliché la différence avec la BB 9288 Capitole sortie par Jouef en 1968 et qui corrigera cette erreur avec des bogies exacts. La version de la BB 9201 verte présentée à droite sur la photo possède une ligne de toiture rapportée qui n’apparaîtra que vers 1967.

La BB9299 reste le fer de lance du coffret de départ « Sud Express » de Jouef, l’un des plus diffusés, et ce pendant une longue période durant les années 60-70.

Le fourgon complète la rame CIWL

Dernier élément de la série des wagons CIWL, le fourgon du train bleu vu ici dans le catalogue 1963.

Plus tard, à partir de 1965, une version éclairée sera disponible sous la référence 460 E. L’exemplaire au premier plan est équipé de l’attelage Playcraft.

Le fourgon EST se voit remanié pour plus de réalisme

Comparaison des deux versions du fourgon type Est référence 462. Il possède maintenant deux portes fixes, mais figurées entre-ouvertes. Le châssis est peint en noir et les inscriptions sont sérigraphiées et très fines. Sur les inscriptions, le fourgon est domicilié sur la gare de Thionville.

Trois nouveaux wagons à deux essieux Europ sur le châssis long de 107 mm.

En 1965 Jouef complète sa série de marchandises à deux essieux par trois modèles dénommés « Europ » dans le catalogue. Ils sont montés sur un nouveau châssis allongé à 107 mm. Sont présents ; un couvert et un tombereau UIC ainsi qu’un tombereau à toit coulissant fonctionnel. Comme présenté sur la photo, le tombereau sera disponible en deux couleurs, vert ou brun avec les portes argentées. Les boîtes de 1964 possèdent une fenêtre transparente permettant de voir le modèle sans le sortir. Dès 1965 ce type de boîte sera abandonné au profit d’emballages à nouveau fermés, mais sans illustration du modèle contenu.

Les tombereaux à toits coulissants référence 622 dans les deux positions, ouverte et fermée. Le côté de la boîte explique le fonctionnement du toit. Il est équipé de passerelles métalliques à chaque extrémité, ce qui rend l’accouplement de deux wagons identiques très court. On peut classer ce wagon dans la série « fonctionnelle » de Jouef. A l’arrière-plan, la page du catalogue 1964 présentant les nouveaux wagons.

Ma petite usine Jouef au fin fond de la campagne du Jura est desservie par le couvert UIC type K.

Grand rayon de courbure et transformateur plus puissant

Pour préparer l’arrivée des modèles de locomotives à l’échelle exacte que seront la CC 4010 et l’autorail Picasso, Jouef sort un troisième cercle de voie dans sa gamme New Rail au rayon de 445mm. Toujours pour préparer l’avenir et l’arrivée de l’éclairage des locomotives et des wagons, un nouveau transformateur d’une puissance secondaire de 600Ma apparaît en 1965, le Disjoncta 600.

Des éléments de pente courbes complètent les ponts

En 1965 Jouef complète son système de ponts par des éléments courbes, ce qui facilite grandement la tâche des amateurs en réduisant la place nécessaire pour construire une rampe permettant le franchissement d’une voie. L’image du catalogue est une reprise de celle composée en 1963 et comprend toujours la vapeur 020T en décoration anglaise, l’ancienne BB 9200 à pantographes fixes et du matériel encore équipé de l’attelage à crochet Jouef.

Maintenant Jouef possède un système complet permettant la construction de ponts, à l’image d’un jeu de construction comme le Lego ou le Meccano. Ce système le met au niveau des grands constructeurs internationaux comme HOrnby-acHO, Märklin ou Faller dont l’on voit sur ce cliché les différents composants permettant à l’amateur de construire ses ponts.


Les catalogues de Faller à gauche et Märklin à droite illustrent bien les différents types de composants proposés à l’amateur du milieu des années 60 pour agrémenter son réseau de rampes et de passages supérieurs.

En 1965 c’est une avalanche de nouvelles « machines »

La prestigieuse et très moderne CC 40100 est mise en avant sur le catalogue 1965 pour porter haut l’ensemble de la gamme Jouef.

Pour le matériel moteur, c’est un véritable tsunami de nouveautés qui s’affichent en pleine page du début du catalogue 1965 avec la prestigieuse CC 4010 réf 843 E, la célèbre BB 13000 réf 842 E de la ligne Valenciennes-Thionville-Metz, et le très populaire autorail unifié 300CV surnommé Picasso réf 832 E. Toutes ces nouveautés mettent en avant un gadget qui deviendra une norme en modélisme ferroviaire ; l’éclairage des phares.

En position sur leurs emballages, prêts à séduire les clients encore peu gâtés par le marché en 1965, les trois nouveaux éléments moteurs de la gamme Jouef.

La rame TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam

Nous sommes à la fin du printemps 1964, la silhouette étrange de la CC 40100 intrigue les cheminots de ce dépôt de l’artère Nord, plus habitués au design déjà moderne des BB 16000 ou 9200. Pourtant les deux dessins sont issus du même auteur, le designer attitré de la SNCF à l’époque, Paul Arzens.

En 1965, ce qui fait le prestige de notre pays c’est le paquebot France, la Caravelle et la nouvelle rame Inox TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam(PBA) tractée par la flamboyante CC 40100. Jouef l’a bien compris et propose très rapidement cette rame dans un niveau de réalisme jusque là inégalé par ce constructeur avec un coffret de prestige qui colle à l’actualité.

Dessin d'anticipation signé Paul Arzens de la rame TEE PBA. A l'origine la CC devait être numérotée 27000.

La rame PBA de Jouef fait une halte en gare de Saverne sur mon réseau collection

La fiche documentaire de la SNCF. La CC ‘40100 fut la seule locomotive quadricourant de la SNCF. Elle fonctionnait sous alimentation alternative 25kv 50 hz (France) 15kv 16hz (Allemagne, Autriche et Suisse) et continue 1500V (France) ou 3000V (Belgique, Hollande, Italie). C’était une véritable locomotive européenne.

Le design révolutionnaire de la CC 40100 incarne en 1964 le renouveau économique de la France et le modernisme au même titre que les immeubles de la banlieue parisienne qu’elle dépasse sur la photo de droite. A l’usage et avec le recul, les deux concepts montreront leurs limites et la CC 40100 sera l’objet d’une fragilité certaine et de nombreuses pannes.

A droite, une esquisse du profil de la CC 40100 surnommée plus tard « nez cassé ». Ce dessin révolutionnaire sur le plan de l’esthétique pour l’époque était dû à l’artiste Paul Arzens , designer attitré de la SNCF. On lui doit les dessins de très nombreux engins ou trains prestigieux comme les CC 7100, BB 9200, Le Mistral ou le Capitole. A droite, l’artiste dans son atelier, rue de Vaugirard à Paris en train de travailler l’apparence d’une voiture voyageur. Notez son réseau à l’arrière-plan, sur lequel circulent ses œuvres, le Capitole, la CC 40100 avec sa rame PBA, le Mistral tracté par une CC 6500.

Après la CC 40100, la famille des « nez cassés » s’agrandira en réalité comme en miniature dans les années 70 à 80, le style Arzens fera recette. A l’avant-plan, deux CC 6500 de marque TAB en décoration TEE et Maurienne verte (Jouef reproduira aussi ces deux modèles, mais avec moins de réalisme). La CC diesel 6500 bleue que Jouef sortira en 1969, la locomotive électrique BB 1500 en décoration verte de Jouef commercialisée en 1974 et les BB 22000 et 15000 de marque Märklin à l’arrière-plan.

Peu après sa sortie en 1965, la rame TEE Paris-Amsterdam de Jouef est directement concurrencée par Lima, comme on la voit ici illustrée sur les pages du catalogue Lima 1965-1966.

Les deux modèles disponibles en 1965 : la CC 4010 Jouef au premier plan et la version Lima en arrière-plan sur la boîte jaune. Les deux reproductions sont à l’échelle et de niveau égal avec un avantage pour les bogies du modèle Jouef qui sont plus réalistes et mieux gravés.

La CC 40100 Jouef a même ses entrées dans le monde People de l’époque et séduit la chanteuse Sheila, c’est vous dire qu’à cette époque le train miniature était populaire et grand public. Bien sûr, il s’agit de l’almanach du rail diffusé par la Vie du Rail, mais on n’imaginerait plus une telle couverture de nos jours.

Les CC 40100 auraient du traverser la Manche dès 1968

Deux créations de Paul Arzens, la BB 16000 en 1958 et la CC 40100 en 1964. Aviez vous remarqué la différence de gabarit. Elle s’explique par le fait que la CC était conçue pour le gabarit plus réduit de l’Angleterre. Elle devait s’y rendre par un pont ou un premier tunnel qui ne verra jamais le jour sous la forme des différents projets étudiés au début des années 60. Sur la droite, on remarque que Jouef a bien reproduit à l’échelle la différence de gabarit, le moteur type M20 étant maintenant peu encombrant, la largeur de la CC 40100 est exacte, et la différence de gabarit se remarque en comparaison de la BB 16000 de la marque qui sera produite à partir de 1967.

Début des années 60, les projets les plus fous sont mis en concurrence pour traverser la Manche. Un tube immergé, un mixte pont/tunnel avec des presque-iles servant de complexes touristiques, le tunnel bitubes, ou le pont comme on le voit sur ces photos.

Jouef poursuit sa collaboration avec Playcraft. Sur cette couverture avant et arrière du catalogue Playcraft 1967 l’on voit à gauche notre célèbre CC 40100. Elle vient juste de traverser le tunnel sous la Manche, qui bien qu’il était encore loin de devenir une réalité. On en voit le portail coté Anglais à droite de l’illustration avec l’inscription « Channel Tunnel ». Playcraft ne s’y trompe pas, la CC à bien été construite sur les dimensions du gabarit Anglais réduit par rapport au gabarit européen pour pouvoir répondre à cette possibilité. Dans les faits, elle ne traversera jamais la Manche, le tunnel arrivera enfin, mais à une époque ou elle est totalement dépassée techniquement et donc trop tard pour elle.

Quatre nouveaux wagons complètent la série des deux essieux

Le catalogue Jouef 1965 présente les 4 nouveaux wagons : un céréalier et un fourgon éclairé sur châssis court, et deux versions d’un isotherme pour transport de boissons en décoration Kronenbourg et Evian + Badoit. Cette dernière possède curieusement deux décorations, différentes sur chaque face.

Les nouveaux wagons Jouef (sur les boîtes rouges) sortis en 1965 face à leurs jumeaux HOrnby-acHO (boîtes bleues ou vertes). Si ces derniers sont légèrement plus détaillés, le prix fait nettement pencher la balance et le choix des clients va se porter largement vers Jouef, obligeant le groupe Meccano à casser ses prix, ce qui lui sera fatal (voir son histoire sur la rubrique « de SMCF à HOrnby-acHO » sur ce même site).

La cour des marchandises de mon réseau collection est peuplée de wagons Jouef en cours de transbordement vers les camions de livraison, alors que sur la ligne supérieure passe un convoi de wagons transportant ciment et spiritueux ou vins de diverses régions de France.

L’autorail Picasso 300 cv, un succès universel et populaire

Illustré en couleur sur le catalogue 1971, l’autorail unifié 300CV surnommé « Picasso » à fière allure. Il est domicilié au dépôt d’Evreux de part ses inscriptions finement sérigraphiées.

Voici l’origine du surnom du Picasso : il devait être bariolé de la sorte. En effet, à la demande des syndicats de la SNCF, des essais avaient été réalisés sur le premier autorail de la série pour le rendre plus visible. La sécurité des cantonniers de la voie et des gardes-barrière sur les petites lignes primait sur les considérations d’ordre esthétique. Cette peinture ne fut toutefois pas adoptée en série.

L’autorail Jouef se présente au PN 62 avec sa remorque. Il fait bonne figure dans le monde du modélisme et comble un vide important qui existait sur ce type d’engins très populaire aux quatre coins de l’Hexagone. En effet, si les ventes de Jouef étaient souvent régionalisées, (comme par exemple, la BB 13000 sur l’Est de la France, là ou elle circulait), il n’en était pas de même pour cet autorail, omniprésent dans nos campagnes et qui s’est abondamment vendu sur l’ensemble du territoire.

Les tout premiers exemplaires sont vendus sans éclairage, comme le modèle de gauche. Ils possédaient des vitres avant transparentes et une reproduction grossière en plastique de la rambarde traversant les baies vitrées. Très vite, courant 1965, le moule est rectifié pour supprimer cette rambarde et le modèle est équipé d’un éclairage avant nécessitant des vitres opaques pour ne pas diffuser de manière irréaliste.

La version de l’autorail, vendue sans éclairage est commercialisée début d’année 1965. Il fait le bonheur des magasins de trains miniatures parisiens qui n’hésitent pas à en faire une large publicité comme « Au Pélican » dans Loco Revue N°248 ou « Baby Trains » dans le RMF N° 35, parus tous les deux en février 1965. Pensez donc, un autorail français et sa remorque vendus 28,50 NF soit environ 35 de nos Euros actuels ! C’est une aubaine pour le modélisme si on le compare au prix du même modèle commercialisé à l’époque par le RMA au prix de 135 NF en souscription fin 1964 (environ 172 Euros). Malgré cette différence de prix importante, le modèle RMA avait une présentation comparable, voire d’un niveau inférieur à celui de Jouef (Voir sur ce site la rubrique histoire du RMA).

Jouef proposait son autorail en deux types de conditionnement ; dans un coffret accompagné d’une remorque et joliment illustré, vendu sous la référence 760 E ou en boîte individuelle sous les références 832 E pour la motrice et 851 pour la remorque. La remorque, par contre, était fausse car extrapolée directement de la caisse de l’autorail avec uniquement le toit re-gravé, ce qui ne reproduisait pas la réalité.

1965 l’année des lumières chez Jouef.

Les pages du catalogue 1965 surprennent et marquent le contraste par une coloration en jaune des baies vitrées des voitures équipées d’origine d’éclairage intérieur. En général Jouef identifiait ses modèles éclairés en ajoutant la lettre E en fin de référence, ce qui est le cas sur ces pages pour les trois fourgons avec l’éclairage rouge de fin de convoi des fourgons illustrés à droite. Mais par contre, pour les voitures, cette mention E n’existe pas sur la référence et Jouef n’a sans doute pas vendu très longtemps des modèles équipés d’origine de l’éclairage intérieur, préférant livrer des sachets permettant à l’amateur de réaliser l’opération s’il le désirait.

L’arrivée de l’éclairage oblige Jouef à modifier ses aménagements intérieurs qui sont dégagés au niveau des bogies pour permettre les raccordements électriques. A l’arrière-plan, les contacts s’établissent grâce à des lamelles positionnées sur les bogies eux aussi modifiés. De nouvelles roues devenues métalliques en laiton bruni et montées uniquement sur un côté, permettent, en croisant les positions sur chaque bogie l’alimentation de l’éclairage par les deux polarités. Notez sur le côté de la boîte, les explications et les schémas permettant la pose de l’éclairage.

Toute une série de voitures et wagons de marchandises sont maintenant proposés équipés d’un éclairage rouge pour les deux feux de fin de convoi. Un insert en plastique translucide guide la luminosité de l’ampoule vers les deux lanternes. Lorsque les modèles sont équipés d’éclairage, la référence est complétée de la lettre E.

Illustrée en couleur sur le catalogue Jouef de 1971, la série des trois fourgons voyageurs avec le bel éclat rouge à l’arrière, évoquant l’éclairage de fin de convoi dont ils sont équipés.

Même le classique couvert UIC à deux essieux est proposé dans une version équipée de feux de fin de convoi sous la référence 624E, ce qui permet de composer une rame complète et homogène de ce modèle, sans fourgon, mais avec le bel éclairage rouge arrière réglementaire à la SNCF.

Un pinceau de lumière jaune évocateur est ajouté sur les illustrations du matériel moteur dans le catalogue 1965. La « lumière » est un gadget très prisé par les jeunes amateurs, il faut le mettre en valeur. C’est aussi, et une nouvelle fois pour Jouef, un moyen de hisser ses modèles au niveau de la concurrence qui, comme Märklin, Fleischmann ou HOrnby-acHO en font un large usage.

Mais l’éclairage est aussi un gros investissement nécessitant la modification de nombreux moules, comme on le voit ici avec la 231C qui en est équipée à gauche, en comparaison avec la version de 1964 à droite. Sur la boîte, on retrouve toujours l’ajout de la lettre E.

La BB 13001 Valencienne-Thionville, vedette de son époque

La carrosserie de la BB 13000 Jouef reprend les normes du constructeur en 1965 ; dimension à l’échelle, gravure fine pour l’époque et grilles d’aération réellement ajourées. Par contre, elle ne possède pas de rambardes rapportées comme sur la BB 67000. Jouef a d’emblée reproduit la BB 13000 dans sa nouvelle livrée verte à moustache jaune de visibilité, qui venait d’apparaître au milieu des années 60, alors que HOrnby-acHO commercialisait en 1964 sa BB 12000 en livrée bleue d’origine. Encore un signe de la volonté de Jouef de coller au plus près à l’actualité des chemins de fer réels et de la SNCF.

Si sur mon réseau collection elle est ici vue tractant une rame de wagons à trémie Arbel, la BB 13000, contrairement à sa sœur jumelle la BB 12000, était plutôt destinée à la traction des trains voyageurs.

Entre 1954 et 1959, avant l’arrivée des BB 16000, la BB 13000 règne en maître sur la traction des trains de voyageurs sur l’axe récemment électrifié en courant alternatif 25000 V qu’est l’artère Lille, Thionville, Metz, Réding, Strasbourg, Mulhouse. Elle fait la une des couvertures de la Vie du Rail à cette époque avec sa silhouette caractéristique.

Illustrés dans la Vie du rail N° 496 (numéro spécial traction électrique de 1955), les appareillages internes de la BB 13000. De conception différente par rapport à sa sœur plus courante, la BB 12000, elle possède une alimentation directe de ses moteurs spéciaux qui sont à courant alternatif contrairement à la BB 12000 pour laquelle le courant est redressé et alimente des moteurs à courant continu . Au final, la BB 13000 se révélera bien plus fragile en exploitation à cause du nombre très important de ses balais sur les collecteurs des moteurs (360, en comparaison, il n’y en avait que 72 sur une BB 12000). C’est la technique du courant redressé à l’intérieur de la machine qui l’emportera avec l’électronique de puissance dans les années 1970 à 90. Les locomotives numérotées 13025 à 13049 seront commandées à l’industrie Suisse, en compensation de l’emprunt que ce pays avait accordé à la France pour électrifier l’axe Metz-Strasbourg-Bâle dès 1957. La Suisse voulait en finir avec les nuisances de la traction vapeur, elle avait elle-même très tôt électrifié son propre réseau et voulait ainsi y inciter ses voisins.

Illustrée dans le catalogue 1971 en couleur, la BB 13000 se singularise de la concurrence par la nouvelle livrée verte, mise en œuvre par la SNCF au début des années 60. L’éclairage des fanaux avant supérieurs n’a par contre jamais été fonctionnel sur le modèle Jouef.

Le grand public ne fait pas la différence entre les BB 12000 et 13000, presque identiques d’aspect extérieur. Aussi la BB 13000 Jouef se trouve dans les années 60 directement en concurrence avec les modèles de BB 12000 figurant à l’arrière-plan de gauche à droite sur cette photo, de Fleischmann, HOrnby-acHO (version bleue puis verte) et SMCF. Plus tard, en 1973, Jouef sortira une version en couleur bleue d’origine visible à l’extrême gauche. Au centre, la reproduction de la BB 12000 commercialisée de nos jours par Märklin.

Les voitures type Forestier évoluent avec une version belge

Ultime évolution de la voiture type DEV acier sortie en 1958, elle est maintenant munie de vitrages encastrés avec cadres en relief et de nouvelles inscriptions avec sigle rond de la SNCF au centre de la caisse (une décoration qui aura une vie très courte en réalité à la SNCF avec l’apparition des immatriculations normalisées IUC en 1966) Au fond, la version belge qui apparaît sous la référence 461 en 1965 et qui ne sera commercialisée que deux années. A l’image des grandes marques comme Märklin, les encadrements de vitrage en relief sont soulignés d’un filet de peinture blanche, ce qui donne un aspect très flatteur à ce modèle destiné à l’exportation vers nos voisins Belges.

Gros plan sur les nouvelles versions du fourgon type Est et de la voiture DEV acier avec l’autorail 300cv en gare de Rothau. La finesse des inscriptions sérigraphiées permet de relever le niveau des anciennes voitures, quant à l’autorail, il est desservi par sa grossière rambarde en plastique très visible, mais qui sera très rapidement supprimée par Jouef, dès la première année de sa sortie en 1965.

Trés rare coffret hors catalogue de la période intermédiaire. Datant sans doute de 1963, il dispose d'un insert en plastique thermoformé dans un ancien boitage en carton avec un couvercle marqué Sud Express sans aucune autre mention.Il contient un prima transfo et, chose assez rare chez Jouef, deux rails droits. Avec quatre wagons de marchandises à boggies Diamond, ce coffret est à classer dans le haut de gamme de la marque.

Une nouvelle série de coffrets de départ est offerte

Dans le catalogue 1965, le choix très vaste en coffrets de départ. Quasiment chaque motrice possède sa rame associée.

Jouef a bien compris que l’aventure commerciale (pour ne pas dire amoureuse) entre un amateur et une marque débute par le coffret de départ, qui doit être attractif. C’est pourquoi un très vaste choix est offert. En plus des intitulés connus comme « electric Trafic », « Sud Express » ou « Orient Express », des appellations plus régionales comme « Thionville Trafic », « Calais-Bâle », ou « Alpenrose » apparaissent en 1965. Une touche plus moderne est donnée pour le haut de gamme avec le coffret « Trans Europ Express » qui est le seul pour l’instant à être livré avec des rayons de courbure moyens de 385 mm du fait de la longueur importante de la CC 40100 et des voitures TEE.

A l’intérieur ou en-dessous des coffrets, des instructions sur l’alimentation et des plans de réseaux pour inciter l’amateur à acheter de nouveaux produits de Jouef. Les coffrets à partir de 1964 sont vendus sans transformateur. Trois possibilités sont offertes; l’alimentation à piles, le Prima transfo 9V ou le transformateur 12 V Disjoncta. Pour permettre l’alimentation par le Prima transfo, chaque coffret (sauf le TEE) comporte le rail spécial d’alimentation 470/A Inv.

Des nouveaux bâtiments issus de la gamme POLA

Dans le catalogue 1965 apparaît toute une série de bâtiments à monter, comprenant à la fois des modèles d’infrastructures ferroviaires (gares voyageur et marchandise, poste d’aiguillage, parc à charbon) et de quoi composer un village. Ces modèles sont d’origine Pola, marque allemande qui commercialise des modèles de bâtiments. La mode de la « maquette à monter » est bien lancée dans les années 60 pour des modèles d’avions ou de voitures avec des marques comme Heller, Airfix, ou autres. Jouef veut la déployer dans le monde du petit train. Pour le coup, la construction démontable traditionnelle de Jouef avec des vis est abandonnée au profit de la colle. Pour ma génération se sera « bonjour les coulures de colle » qui gâcheront de nombreuses maquette.

Les maquettes d’origine Pola sont de conception simple. Il n’y a pas de vitrage. Sans décoration comme ici, elles sont relativement austères. Beaucoup de boites ne possèdent même pas une illustration du modèle sur le couvercle.

Les trois types de gare sont d'inspiration Italienne, bien que rebaptisées Bellerive, Moutier ou Hauteville. Au début, les pièces livrées dans les kits sont déjà détachées comme sur ce cliché dans la boite référence 770 (gare de Moutier). Plus tard, lors des dernières années d'utilisation par Jouef des produits Pola, les pièces seront livrées encore attachées en grappe, comme au sortir du moule.

Ici est illustrée sur un catalogue Pola la gare vendue par Jouef sous le nom de Bellerive.

La même gare de Bellerive mise en scène dans un décor d'ambiance Meditéranéenne et touristique. Le socle de ce modèle Pola s'assortissait mal avec les quais de fabrication Jouef.

La gamme des bâtiments d’origine Pola est présentée sur ce cliché (excepté les gares). L’usine de concassage sur la gauche ne sera commercialisée qu’en 1966. C’était un modèle très attrayant avec son dispositif de déversement des granulés commandé par un électroaimant. Elle complétait bien les wagons à trémie fonctionnels. Jouef commercialisait aussi une entrée de tunnel à deux voies, des murs de soutènement et des lampadaires fonctionnels. Bref de quoi réaliser un décor dans son ensemble.

Le must de l’époque, le moulin à eau fonctionnel avec une pompe qui actionnait la roue en faisant circuler de la véritable eau (que je m’amusais à colorier à la gouache car elle me paraissait trop transparente). Jouef peut ainsi concurrencer Faller qui commercialisait sur le même principe le modèle à l’arrière plan.

Le poste d’aiguillage n’était pas typiquement de type Français, mais il était suffisamment passe-partout pour s’adapter à un réseau dans notre pays. Noter la bicyclette posée contre le mur qui faisait partie du kit. A l’arrière plan deux wagons citernes Jouef super-détaillés qui stationnent sur mon réseau collection.

Un nouvel album de plans de réseaux est édité en 1965 en collaboration avec la revue RMF. Par rapport à la version précédente, il met plus l’accent sur le décor en proposant l’emplacement des bâtiments et même sur certains plans, le relief, ce qui est une petite révolution pour ceux qui n’imaginait jusqu’alors qu’un réseau « plateau » aussi appelé « plaque » dans certains foyers.

Certaines boites de construction sont illustrées d’une image, comme ici le petit hangar de gare ref 774. Paradoxalement, on y retrouve du matériel vendu par la concurrence comme ce tombereau à guérite de Fleischmann. Jouef aurait pu se donner la peine de reprendre l’illustration avec son propre tombereau ref 623 visible au premier plan. A noter que sur les boites figurait la mention « fabriqué en Allemagne ».

La technique évolue avec le moteur M20

Trois motorisations, trois époques de l’évolution Jouef dans un même modèle ; la vapeur 020 T. De gauche à droite, le moteur M40 de 1955, le moteur M60 de 1962 et le M20 de 1964. Si l’évolution va toujours vers plus de miniaturisation, il n’en est hélas pas de même pour ce qui est de l’efficacité.

Illustration en éclaté du nouveau moteur M20 qui sera le fer de lance de la marque durant plusieurs décennies en évoluant de la version trois pôles du début vers une version 5 pôles plus souple d’utilisation (en théorie).

Les premiers châssis équipés du moteur M 20 sont à 4 essieux moteurs comme au premier plan celui de la première version sans éclairage de la BB 6700. Le moteur est situé très bas dans la caisse noire représentant le réservoir. Cette disposition permettait de libérer l’espace pour l’arbre de transmission reliant les deux bogies. A partir de 1966 les châssis ne possèdent plus que deux essieux moteurs comme sur la BB 9200 en arrière plan. Le moteur est ainsi remonté au dessus de la tôle formant châssis. La transmission est ainsi grandement simplifiée. Pour compenser le passage de 4 à 2 essieux moteurs, ceux-ci sont équipés de bandage d’adhérence, toujours à partir de 1966. Le grand reproche des modélistes concernant les châssis à 4 essieux moteurs, c’était le niveau sonore important. C’est sans doute cette raison et aussi, la réduction des coûts, qui a motivé cette évolution.

Le pantographe, extensible mais non fonctionnel pour une prise de courant entame lui aussi une longue carrière d’abord sur la BB 9200 et ensuite sur la BB 13000. Bien d’autres modèles qui en seront équipés suivront. Ils apparaitront dans différentes versions ; de petite dimension, l’un nickelé sur la BB9200 du fond, l’autre bruni en avant-plan à droite et dans une version agrandie à gauche (vers 1967).

Grosse évolution technique aussi, mais pas forcément dans le bon sens, le passage du profilé des New Rails du laiton à l’acier zingué ou acier Chromaté. Celui-ci apparaît à partir de 1962. Le laiton assurait une bien meilleure conduction, mais sa couleur n’était pas réaliste pour les modélistes. Jouef adoptera bien plus tard le maillechort, mais en attendant, oxydation, mauvais contacts et plantages sur les aiguillages sera le lot quotidien des amateurs équipés de la voie acier. Cela desservira beaucoup la marque face à la concurrence de Fleischmann ou de Märklin qui ne négligeront jamais la fiabilité au détriment de l’esthétique. Quant à moi, à l’époque, je trouvais les rails laiton « ringards » lorsque je découvrais la nouvelle voie acier chez mes camarades. Je n’aimais pas non plus le mélange des couleurs laiton et acier sur mon réseau, mais je n’avais pas le choix, mon père complétait notre réseau avec la voie acier. Notez aussi l’évolution des couleurs des heurtoirs qui passent chronologiquement du gris, au très beau rouge façon jouet à tampon blanc, puis au blanc à tampon rouge, plus réaliste. Notez également l’évolution des boites qui adoptent le schéma décoratif caractéristique de deux décennies pour Jouef.

L’aventure Britannique avec Playcraft continue

Pour poursuivre l’exportation de ces modèles et les commercialiser sous la marque Playcraft, Jouef sort en 1963 deux modèles de wagons tombereau, un reproduisant un modèle tôle comme sur la photo et l’autre un modèle à frise de bois. Ils constitueront les derniers modèles conçus pour l’Angleterre. Les modèles de wagons et de voitures anglais ne seront plus commercialisés en France. On retrouvera par contre ces deux tombereaux dans des coffrets de départ sur notre territoire. Si l’ancien couvert ref 635 à portes coulissantes termine sa carrière en France, il la poursuivra encore en 1963/64 de l’autre coté de la Manche. Notez que Jouef a du réaliser de gros investissement pour modifier les châssis afin de les adapter aux nouveaux attelages, comme sur le Brake Van. Ils auraient pu, en France être équipés de l’attelage international, mais ce ne sera jamais le cas.

En première page du catalogue Playcraft 1963 est présenté le nouvel attelage. Pour l’Angleterre, ce n’est pas l’attelage universel, mais une licence PECO déjà adoptée par Hornby-Dublo et Hornby-acHO qui sera mise en œuvre. La possibilité de préemption verticale des wagons est un avantage mise en avant, de même que l’attelage plus rapproché des véhicules. A noter la commercialisation d’un crochet compatible avec l’ancien attelage Jouef, qui parait bien pratique, mais qui ne sera jamais commercialisé en France.

Le paradoxe est que l’attelage Playcraft est compatible avec le premier attelage standard de HOrnby-acHO, le grand concurrent de Jouef sur le marché du petit train. Le Hornby est nettement plus fin et plus élégant dans sa première version que le Jouef, mais en plastique, il se révèlera aussi plus fragile.

Même en étant de construction totalement différente, ces deux attelages fonctionnent parfaitement entre eux. Une compatibilité dont Jouef ne voudra surtout pas, préférant la politique commerciale agressive à la collaboration pacifique. Au final, ce sera Hornby qui adoptera l’attelage universel deux ans après Jouef en 1965.

Le coffret TEE vendu en Angleterre avec juste l’étiquette Playcraft collée sur le logo Jouef du couvercle.

A partir de 1963 il n’y aura quasiment plus de modèles anglais créés, par contre tous les modèles Français seront commercialisés. Mais Jouef adaptera joliment ses coffrets à la marque Playcraft avec de belles illustrations comme ici à gauche le « Goods train », le pendant Anglais de notre populaire « Electric Trafic ».

On y retrouve dans la gamme Playcraft les wagons à deux essieux. Pour certains comme le citerne et le transport de ciment, les décalcomanies et les inscriptions sérigraphiées sont totalement différentes, adaptées au marché Anglais. Pour d’autres, comme le couvert, l’origine continentale n’est pas cachée et aucune adaptation n’est faite.

Une page du catalogue Playcraft 1963 présentant les wagons de marchandise. Noter le plat à ranchers qui en Angleterre est livré chargé de voitures. On retrouve le vieux couvert à coté de la nouvelle gamme des wagons à deux essieux.

Les wagons de la série « diamond » possèdent aussi des inscriptions particulières, mais sous forme d’étiquettes en papier.

Comment reconnaître les boîtes Jouef de cette époque

En 1963, lors du changement de type d’attelage, une bande verte marquée « accrochage international » est collée sur un coté de la boite.

L’évolution du boitage pour une même voiture inox ref 463 entre 1963 et 1966. Dans le sens des aiguilles d’une montre ; une boite illustrée du wagon avec attelage à crocs et bandelette verte « accrochage international » de 1963, boite illustrée avec l’attelage international, boite standards pour plusieurs modèles de voitures voyageur avec petites illustrations à l’arrière et des explications pour l’installation de l’éclairage. Pour ce dernier type, au fil du temps, avec l’augmentation du nombre de modèles, la partie illustrée arrière sera complète et les illustrations déborderont sur la partie avant.

Même évolution pour les wagons de marchandise à deux essieux qui disposent de boitage spécifique avec illustration particulière à chaque modèle en 1963.

En 1964 apparaît un nouveau type de boitage possédant une fenêtre qui permet d’admirer le modèle. Elle nécessite le collage d’une plaque de rhodoïd transparent à l’intérieur. Elle aura une duré trés éphémère chez Jouef en disparaissant dès 1965. Ensuite apparaitra pour les wagons à deux essieux série 107 des boites non illustrées mais possédant une inscription avec le type de wagon. Au final pour cette même série et pour d’autres des boites standardisées avec de multiples illustrations. Seule l’impression du modèle et de la référence sur le rabat permet d’identifier le modèle. Ce type de boite sera généralisé à toutes les séries dans la deuxième moitié des années 60.

Comme on peut le voir sur cette photo, les boites standardisées évoluent au fil du temps en s’enrichissant des illustrations des nouveaux modèles. Sur cette photo, les boites de la Pacific 231 C ; c’elle de 1964 possède une unique illustration (et une fenêtre sur l’autre face), en 1964 les illustrations sont complétées de modèles de même longueur pouvant être contenu dans ce type de boite comme la CC 40100 et l’autorail Picasso. En 1967 s’ajoutera la CC 7002.

Comme avec les attelages à crochets, une petite pièce en carton protège les attelages à l’intérieur des boites et participe au calage du wagon dans son emballage.

Le wagon à trémie VB étant particulièrement fragile, un suremballage interne en carton le protège.

Jouef entre définitivement dans le monde du modélisme

Jouef est maintenant une marque de pointe dans le petit monde du modélisme ferroviaire des années 60 comme le prouvent les deux couvertures de RMF de novembre 1965 et janvier 1966 et ces publicités publiées dans Loco Revue d’avril et juin 1965. On y retrouve, proposés par les revendeurs parisiens bien connus à l’époque que sont « Baby-Train » et « La maison des Trains » toutes les nouveautés de la gamme 1965 à des prix forts alléchants.

La couverture arrière de la Vie du Rail N°1025, spécial Noël de décembre 1965 présente exclusivement des modèles Jouef. Comme indiqué, les photographies ont été prise sur le réseau de Mr Baldit , un modéliste parisien, avec son aimable autorisation. Que sont devenus les enfants que l’on voit s’émerveiller à la contemplation de ce beau réseau ?

En guise de conclusion de cette troisième rubrique consacrée à l’histoire de Jouef, une vue de mon réseau collection sur lequel le matériel de cette marque a gagné ses lettres de noblesse avec la 231C, les wagons à deux essieux. Viendra plus tard pour compléter cette ambiance Nord, la 231 R « Club Jouef », mais ceci est une autre histoire, que je vous raconterai par la suite.