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GéGé et Troby contre Jouef


GéGé complète sa gamme de jouets avec des trains miniatures

Les éléments marquants de la production GéGé des années 60 : la BB 9200, les voitures inox, sa gare moderne et la rame Capitole.

Le cas de la marque Gégé est particulier. Son fondateur, Germain Giroud, n’a que 22 ans lorsqu’il démarre son entreprise à Montbrison, dans le département de la Loire, en 1934. Le nom de GéGé est issu des initiales de son créateur. Dans un premier temps, l’entreprise fabrique des tissus, mais il viendra à l’idée de Monsieur Giroud d’utiliser les chutes de tissu pour fabriquer des poupées. Dès 1939, cela deviendra l’activité principale. Les poupées resteront la spécialité de la marque, d’autant que l’épouse de Mr Giroud, Juliette Nourisson s’occupera de l’aspect artistique et développera toute une adorable collection qui suivra la mode de son époque. En 1947, une nouvelle usine est construite ; elle sera dotée d’un atelier d’injection de plastique et des licences sont obtenues auprès de Rhône- Poulenc pour utiliser cette matière nouvelle qui va révolutionner le monde du jouet. Cela permettra à GéGé de se diversifier : à côté des poupées apparaissent des dînettes et toute une série d’automobiles électriques téléguidées à l’échelle du 1/18ième dont la Simca Versailles qui obtiendra l’oscar du jouet 1955. Mais GéGé c’est aussi des jeux de construction « Batibois », des coffres d’outils pour enfants ou des boîtes de jeux scientifiques comme l’Electricien, le Jeune Radio, le Petit Chimiste, le Petit Biologiste et même, sur un thème d’avant-garde, « Ordinatron 600 » qui fait découvrir les ordinateurs aux jeunes. A la fin des années 50, Gégé est donc un fabricant de jouets généraliste avec une large gamme de produits ; il ne lui manque qu’une corde à son arc, le train miniature. Et il va sauter le pas.


Publicité dans un magazine pour la jeunesse sur le nouveau train GéGé.

Le choix du H0 est ciblé « grand public ».

En 1959, le premier train GéGé comprend un modèle de BB 9200 très dépouillé, des voitures inox et un solide transformateur.

GéGé, en tant que fabricant de jouets majeur en France, veut à la fin des années 50 récupérer une part du gâteau commercial que représentent les trains miniatures. C’est un marché en forte croissance à cette époque. Les premiers trains GéGé sont présentés à la foire de Paris de mai 1959. On est en plein dans le grand mouvement d’abandon de l’échelle 0, avec Hornby qui démarre aussi sa gamme H0. Jouef, pour sa part, a aussi choisi le H0 depuis 1955 et la marque de Montbrison en fait son modèle. C’est le système 2 rails à courant continu qui est adopté. Mais contrairement à Jouef, le 12V est dès le départ au rendez-vous, rendant le matériel compatible avec la concurrence.
Au moment de lancer sa gamme de trains miniatures, GéGé a déjà son réseau commercial puissamment orienté vers les grands magasins comme la Samaritaine ou le Printemps, en plus des magasins de jouets traditionnels. Contrairement au HOrnby-acHO qui naît simultanément, la cible sera donc délibérément des modèles de type « jouet ». Le choix des débuts est des plus réduit ; une BB 9200, des voitures Inox et quelques wagons de marchandises. Avec ses quelques modèles, GéGé surfe sur la vague des trains modernes et propose de nombreux coffrets de départ avec des noms évocateurs ; Le Mistral, L’Aquilon ou le Provence Express.

Tout commence avec la BB 9240.

La BB 9240 sera le modèle-phare de GéGé tout au long de son incursion dans le monde du train H0.

Les différentes versions de la BB 9200 Gégé ; de gauche à droite : Aquilon simplifiée, de 1960, Mistral, Aquilon détaillée et Mistral d’après 1968, dotée de pantographes fonctionnels

La BB 9200 est le type d’une série de 92 machines construites par la Société des Forges et Ateliers du Creusot (SFAC) pour les besoins de l’électrification de Lyon-Méditerranée en courant continu 1500V. Ce type de locomotive est livrée à la SNCF à partir de 1957. Compte tenu du temps nécessaire à la réalisation des outillages, Jouef colle de très près à l’actualité et mettant ce modèle à son catalogue dès 1958. En 1959, GéGé choisit ce modèle moderne et représentatif de son époque pour s’attaquer au monde du train miniature. Le modèle de base était dénommé Aquilon, du nom du train qui, en 1959, relie Paris gare de Lyon à Lyon Perrache en quatre heures et cinq minutes. Cette locomotive se présente de manière très simplifiée. De manière singulière, elle est équipée de pantographes unijambistes, alors que la locomotive réelle est équipée du type G classique. Pourquoi cet écart ? Peut-être aussi pour apporter une touche de modernisme supplémentaire au modèle. Ces deux pantographes sont les seules pièces rapportées, mais ils sont de piètre qualité : de simples fils de fer rigides équipés d’une palette fictive, en cuivre tout de même. Gégé va proposer une version superdétaillée baptisée, Mistral. Cette dernière possède des vitrages ; de la peinture argent orne maintenant les enjoliveurs et les phares ; des mains montoirs sont rapportées ; la face frontale est dotée de plaques Mistral. Les pantographes, toujours de type unijambistes, sont articulés et mobiles, bien qu’encore très rudimentaires. Une ligne de toiture est ajoutée. Mais si la carrosserie de sa BB 9200 est assez fidèle et presque à l’échelle, les boggies et le côté « haut sur pattes » sur son châssis la desservent vis-à-vis de la concurrence.

La première publicité fait allusion au record du monde de vitesse. Mais contrairement à Jouef qui propose la BB 9004, qui en est la codétentrice, la BB 9240 de GéGé n’en est pas titulaire.

Une technique très particulière à la marque

Par contre cette première locomotive va marquer sa différence par les solutions techniques utilisées. Le moteur central, de fabrication GéGé est volumineux. Ce qui est très particulier, c’est le mode de transmission . Deux axes, reposant sur des paliers en delrin, transmettent le mouvement aux 4 essieux grâce à 4 courroies. Leur élasticité permet d’absorber la rotation des boggies. La captation du courant est tout aussi originale. Deux pièces de zamac constituent les flancs de boggies reliés par une pièce centrale en plastique. Les roues en laiton tourné sont reliées par des tambours en plastique de fort diamètre sur lesquels viennent s’appuyer les courroies de transmission. Le courant passe directement des roues aux flancs des boggies. Ainsi tous les essieux participent à la prise de courant.

La technique de transmission par courroies, l’isolement des roues par un tambour plastique et les bogies zamac permettant la captation par chaque essieu sont des caractéristiques de tous les engins moteur Gégé.

Les incontournables voitures Inox pour accompagner la BB 9200

Durant les années 50, alors que la couleur verte règne en maître pour le service voyageurs, les voitures inox de la SNCF font l’effet de vaisseaux sortis d’un autre monde. Bien évidemment, le monde de la miniature s’empare rapidement de cette image moderne. Tout comme Jouef, GéGé propose son modèle d’une longueur de 22,5cm, assez finement reproduit en plastique injecté. Les boggies de type Y29 sont en zamac moulé. Gégé propose deux versions, la plus simple est baptisée Aquilon, du nom du train Paris-Lyon. Une version plus luxueuse au nom du train Mistral possède un aménagement intérieur. GéGé sortira également une version raccourcie, d’une longueur de 18 cm, principalement destinée aux coffrets de départ. Les voitures inox de 22,5cm seront progressivement améliorées. D’abord en plastique brut, elles seront ensuite peintes. Les « Aquilon » seront dotées d’une bande jaune au-dessus des baies vitrées, selon la norme depuis 1959 à la SNCF. Les « Mistral » seront dotées d’un bandeau rouge marqué « Trans Europ Express » comme dans la réalité.

A partir de 1965 les voitures inox sont peintes et dotées d’un bandeau, rouge pour la « Mistral » ou jaune pour l’« Aquilon ».

Même si la géographie française rend théoriquement la chose impossible, sur un réseau GéGé, l’Aquilon peut croiser le Capitole.

Gégé utilise le Mistral comme emblème

Le point central de sa gamme est la BB 9200 accompagnée de voitures inox. Et pour contrer la concurrence de Jouef, Gégé décline deux trains de la SNCF, l’Aquilon dans une version simplifiée, et le Mistral type 56, pour sa gamme plus luxueuse. Pour cela la BB 9200 est dotée de détails supplémentaires comme les pantographes fonctionnels, et surtout, de belles plaques Mistral frontales, ce qui est une première pour une reproduction de ce train. Dans les publicités parues dans les magazines pour la jeunesse, comme Tintin ou Spirou, une confusion est faite, sans doute volontairement, entre la vitesse commerciale du Mistral et le record du monde de vitesse acquis par la SNCF en 1955. Ce train reste emblématique de la première moitié de l’existence éphémère des trains Gégé.

Le côté du coffret Mistral de Gégé est illustré de la fameuse plaque frontale ailée.

> Le coffret Mistral des débuts de Gégé en 1960 ; notez la belle gravure du couvercle, illustrant le train longeant une mer que l’on suppose être la Méditerranée. La brochure affiche un record à 331km/h, mais ce n’est pas pour la BB 9200 du Mistral.

Différentes époques et différentes versions de la voiture inox (Les dernières versions des voitures inox sont dotées de la bande rouge TEE) et de la BB 9240. Toutes sont dotées de plaques Mistral rapportées.

Le Mistral 56 de Gégé. La BB 9200 et les voitures sont dotées de plaques en relief à l’effigie du célèbre train.

Le catalogue Gégé de 1963 à la page du Mistral.

Des wagons de marchandises calqués sur Jouef

Le transport ferroviaire des marchandises étant un incontournable des trente glorieuses, Gégé ne pouvait en rester là. Dès 1960, il propose une gamme de wagons de marchandises calqués sur la fameuse série « Diamond » apparue chez Jouef à partir de 1958. Comme chez son concurrent, les modèles sont de la série TP (Travaux Publics). La gamme comprend un couvert, un plateau, un tombereau, un surbaissé chargé d’un transformateur. Le wagon-citerne est de facture plus moderne et connu de nombreuses versions. Le wagon porte-automobiles de type TA 60 aurait dû être le seul wagon à deux essieux de GéGé. Ce ne sera le cas qu’à ses débuts. Sans doute pour des questions d’inscription dans les courbes, il est rapidement doté de bogies Diamond, comme le reste de la gamme. Entre 1961 et la fin de la production GéGé, aucun nouveau modèle marchandise ne s’ajoutera plus à cette gamme. Mais GéGé s’ingéniera à l’améliorer en la dotant d’inscriptions sérigraphiées à partir de 1964, ainsi que d’autres perfectionnements.

L’assortiment des wagons de marchandises de Gégé, tous à bogies de type « Diamond »

Le catalogue 1965 présente la gamme des TP : couvert, tombereau et plat à bords bas.

La version chargée de caisses en bois véritable du plat à bords bas, dans sa dernière exécution. Il est de couleur UIC (brun-rouge) avec inscriptions sérigraphiées ?


Trafic marchandises intense. On y retrouve les deux versions du plat à bogies (celle du premier plan est chargée d’une caisse d’origine Electrotren).

La BB 6300 manœuvre un tombereau chargé de charbon. Devant la gare de marchandises Kibri des années 50, les portes coulissantes du TP couvert permettent des scènes de déchargement animées par des personnages MDM.

Le wagon citerne est de facture plus moderne que les wagons TP. Il a connu de nombreuses versions. C’est en premier lieu des décorations BP et Esso assez classiques. Viendrons ensuite des modèles Butagaz en 1968 puis sur la fin en 1974 la citerne siglée du logo Elf. Comme Jouef, Gégé sort aussi en 1965 un wagon plat surbaissé chargé d’un transformateur de fabrication Jeumont. Le transformateur sera toujours de couleur bleu, mais le wagon bénéficiera des couleurs brun sombre, puis brun rouge UIC dans les dernières années.

Photo ; Quelques unes des nombreuses décorations du wagon citerne Gégé réf 6414

Photo ; Une rame de citerne alimente les pompes à essence pour assouvir la soif des automobiles qui se multiplient sur les routes. Sur la voie de garage, le surbaissé, porte un transformateur de fabrication Jeumont.

Un porte-autos original

Dans le catalogue 1961, le wagon porte auto TA 60 est proposé en version 2 essieux, par la suite, il sera équipé de bogies, contrairement à la réalité.

A gauche, le TA 60 de GéGé dans les deux couleurs produites. A droite, la version du RMA, commercialisée à partir de 1967. Cette dernière reproduction surclasse le modèle GéGé, mais il ne s’agit pas du même prix de vente.

Deux types de voie dès les débuts

Le très complexe système de jonction à doubles éclisses décalées de la voie « Sécurité ».

Tout comme la voie Jouef de première génération, mais en version plus robuste, la voie « Sécurité » de GéGé permet un assemblage solide des circuits à même le sol.

Pour le train électrique, GéGé aura une approche singulière. Deux types de voie sont proposées d’emblée. En premier lieu la voie dite « Sécurité ». Elle porte bien son nom, car elle est vraiment robuste. Elle est montée sur une reproduction du ballast en matière plastique grise de 5mm d’épaisseur. Aux extrémités, un décalage entre les deux rails est créé, sans doute pour réduire le risque de déraillement. Ce dernier est en tôle de laiton roulée, d’une hauteur proche de 4mm. Aux extrémités, des éclisses doubles en tôle emboutie viennent s’emboîter solidement à l’intérieur du profilé creux et du ballast. Cette voie sera peu distribuée, car très chère par rapport à la voie « Traverses » : quasiment le double du prix pour un élément droit ou courbe. Un élément de transition est disponible pour passer à la voie « Traverses »

Le second type de voie, dit « Traverses » reprend le profilé en laiton creux, mais monté cette fois sur un travelage plastique.

A l’époque où Jouef abandonne sa voie ballast pour son New Rail, GéGé suit le mouvement et propose une voie plus simple et plus économique, dite « Traverses ». Le même profilé en laiton creux, identique à la voie « sécurité » est utilisé. Il est bloqué dans un travelage en plastique noir. La géométrie et le choix des rails sont identiques à la gamme de voies « Sécurité ». Un autre élément de transition est disponible et permet le passage vers des voies classiques en deux rails à profilé plein, comme les productions HOrnby-acHO, Jouef ou Fleischmann Modèle.

L’assortiment de voies de type « Traverses » avec ses différentes boîtes. On distingue deux générations de celles-ci, avec ou sans illustration de la voie.

Le curieux élément de voie de transition, permet de connecter la voie Gégé à une voie HOrnby-acHO ou Jouef New Rail.

Les différents éléments de voie type « traverse » illustrés dans le catalogue Gégé 1963.

Des systèmes d’alimentation variés et robustes

N’oublions pas que GéGé est un fabricant de jouets généraliste. Il produit aussi des circuits routiers et des coffrets scientifiques comme « L’Electricien » ou « Le Jeune Radio ». Pour cela, il est nécessaire de disposer d’alimentation électrique. Une alimentation coûte cher. Aussi, comme Jouef, GéGé propose des modèles à pile pour une utilisation peu intensive. Les véritables transformateurs sont, eux, disponibles en différentes puissances sous les noms évocateurs de Prim-Elec, Norm-élec ou Sup-Elec. A une époque ou EDF fait passer progressivement l’alimentation domestique d’une tension de 110V à celle de 220V : une fiche située en-dessous des transformateurs permet de basculer dans l’une ou l’autre de ces deux tensions. C’est un plus par rapport à Jouef et HOrnby-acHO qui livrent à la même époque des transformateurs adaptés à l’une ou à l’autre. Au moment du passage au 220V, il faut alors tout racheter.

Les alimentations de GéGé sont d’abord livrées en gris ; plus tard, elles basculent vers le bleu ciel.

L’alimentation « Sup-Elec » est dimensionnée pour 5 trains. Le schéma du catalogue 1965 montre le branchement de plusieurs circuits ou voies de garage avec des sous-stations.

Les différents types de boitiers d’alimentation à piles et de transformateurs Gégé ainsi que leurs modes de raccordement aux voies « traverse » ou Sécurité ». Les transformateurs possèdent le fameux bouton pour réenclencher le disjoncteur, si vous êtes allé trop loin en termes de consommation.

Une gamme d’accessoires qui traversera le temps

Sur cette photo, l’ensemble de la gamme des accessoires GéGé : le tunnel, les heurtoirs, les barrières et la gare.

L’élément central de la gamme des accessoires est bien entendu la très belle gare moderne. Joliment décorées de bancs, de fleurs et de barrières, elle sera disponible en version «luxe » équipée d’éclairage intérieur à pile. En complément, Gégé propose un tunnel dans une curieuse configuration en deux parties. C’est sa réponse au fameux tunnel désigné « manteau de chien » de Jouef. Dans les autres accessoires, on retrouve une boîte de 8 barrières qui ressemblent beaucoup aux modèles de Jouef. Il existe aussi une boîte de 2 heurtoirs. Ils sont assez réalistes, façon maçonnerie en pierre de taille. Tous ces accessoires sont commercialisés jusqu’à la fin.


Les accessoires ; heutoirs, barrières et tunnel illustrés dans le catalogue avec un exemple de réseau en 8, une spécialité de Gégé.

Pas de quais disponibles ici, chez GéGé, mais sa gare s’accommode assez bien des modèles Jouef.

La notice livrée avec le tunnel.

Une entrée de tunnel GéGé intégrée dans un décor met en valeur la BB 9200 version Mistral.

Le tunnel en deux parties, sa boîte et sa notice d’utilisation. Un ensemble très inspiré du tunnel « manteau de chien » de Jouef.

GéGé nous propose un beau modèle de gare.

Le fabricant de jouets GéGé n’a pas une forte réputation pour le réalisme de ses modèles. Cependant il tient à présenter une gamme complète avec des accessoires, et, bien entendu, une gare. Cet édifice de style moderne apparaît dès 1959. L’emballage est particulièrement soigné, pour attirer l’œil dans les nombreux bazars de province auxquels GéGé le destine. Il y aura trois types de boîtes différentes, mais toujours avec des décors à faire rêver : bord de mer ou montagne. Hormis sa boîte, la gare GéGé a des atouts réels : elle est bien décorée, avec des jardinières fleuries, des bancs et de coquettes barrières blanches. Raffinement suprême, la version dite « luxe » est dotée d’un éclairage.Comme Jouef, GéGé destine sa gare aux jeux à même le sol, et pour cela, les câblages sont à proscrire. Aussi l’alimentation se fait-elle à l’aide d’une pile intégrée dans le bâtiment. En plus de l’éclairage intérieur, les boules extérieures sont également lumineuses. Autre petit gadget, la gare GéGé est la seule de son époque où il est possible de régler l’heure. Les aiguilles de l’horloge sont en métal bien réel et montées sur un axe central. Il est ainsi possible de les manipuler, et le temps ne reste pas figé.

Particularité de la gare GéGé, son horloge dotée d’aiguilles mobiles pour régler l’heure. Ainsi, le temps miniature n’est pas figé.


Pour séduire, même au sein de la grande distribution, les gares GéGé sont présentées dans de superbes boîtes décorées intérieurement de paysages de bord de mer ou de montagne.

D’allure moderne, la gare Gégé se retrouvera sur plus d’un réseau français des années 60.

Un passage à niveau fantôme

Il y a un petit mystère qui entoure un modèle de passage à niveau, illustré dans le catalogue 1963. Il devait être la réponse au modèle manuel de Jouef, mais cette fois en deux parties, permettant le passage de plusieurs voies. On le voit avec une portion de route courbe sur un côté, une droite de l’autre. A priori la commande des barrières devait être manuelle. Des accessoires (barrières, lampadaires, poteaux télégraphiques) devaient agrémenter cet accessoire. A priori, il n’a jamais été commercialisé, on n’en trouve pas de trace dans les tarifs. Dommage !

La page du catalogue 1963 qui présente le prototype du passage à niveau qui ne sera jamais commercialisé.

Un diesel de manœuvre inédit, mais qui déçoit.

Le deuxième engin moteur de Gégé sera la BB 63000, sortie en 1964. Le modèle est bien choisi, il est omniprésent aux quatre coins de la France et aucun fabricant ne s’y est intéressé. La BB 63000, qui est pourtant le diesel le plus courant à la SNCF. Mais la déception sera grande : le modèle de GéGé est littéralement défiguré, avec une cabine démesurément longue. Il faudra encore attendre le modèle Au Pullman sorti en 1968, pour avoir une reproduction correcte de BB 63000. Et pour qu’il soit accessible à toutes les bourses, ce sera le modèle de Roco.

La photo de la locomotive SNCF est trompeuse, car le modèle GéGé ne lui ressemble guère. Pourtant la BB 63000 sera utilisée par GéGé dans de nombreux coffrets marchandises.

L’illustration du coffret attire l’attention sur un modèle très attendu des amateurs. Il est hélas totalement desservi par sa cabine trop longue. Ce sera le modèle Allard/Au Pullman, à droite, qui sera la première reproduction correcte de la BB 63000.

La BB 63000 manœuvre une rame de voyageurs UIC pour la placer à quai.

Comme chez Jouef, l’attelage évolue.

Les premiers modèles GéGé sont dotés d’un système d’attelage à crochet, un peu à la manière de celui de Jouef, mais de taille plus importante et, surtout, situé plus haut par rapport aux tampons. On aurait pu penser que GéGé cherchait la compatibilité avec Jouef ; en fait il n’en est rien. C’est sans doute la stabilité de l’accrochage qui a été recherchée. En le situant très haut par rapport au centre de gravité des wagons, on évite les phénomènes de renversement en courbe (et celles de GéGé sont serrées). A noter aussi que la boucle recevant le crochet est très large, permettant un bon appui au refoulement, et aussi un accrochage automatique qui reste opérationnel en courbe. Tout cela est fonctionnel. Une tige terminée par un disque permet l’action du rail de décrochage disponible avec la gamme de voies « Traverses ».

Le premier type d’attelage à crochet de Gégé (à gauche), de même principe que celui de Jouef (à droite), mais situé plus haut, ce qui le rend incompatible.

En 1965, Gégé abandonne son système d’attelage spécifique. Il se rallie au fameux attelage à boucle universel inventé par Märklin ; En cela il suit la voie de Jouef, qui a réalisé la même évolution avec son attelage « international ». L’attelage à boucle est situé bien plus bas que l’ancien attelage à crochet. Mais les premiers modèles de wagons conservent l’échancrure dans la traverse de tamponnement. Cependant, l’attelage universel est bien plus discret que l’ancien crochet. Et les modèles y gagnent en réalisme.

A droite, le nouvel attelage universel à boucle de type Märklin, adopté par Gégé pour tous ses modèles à partir de l’année 1965.

Le TEE Paris-Amsterdam comme Jouef et Lima

L’année 1965 voit aussi naître, à l’été, la reproduction du train TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam. Ce train est composé de la célèbre CC 40100 quadri courant, d’une voiture A8 et d’un fourgon générateur A2DS. La concurrence sera sévère car Jouef et Lima sortent à la même époque exactement les mêmes modèles. Le magazine RMF compare les trois reproductions dans son numéro de novembre 1965. Or la reproduction de GéGé, toujours pour loger l’énorme moteur maison, est beaucoup trop haute (48mm pour 41 à l’échelle), trop large et en plus énormément raccourcie pour s’inscrire dans le rayon de courbure étroit de la marque. Résultat, une silhouette trapue et lourde qui n’est pas du tout celle de la locomotive réelle. Lima et Jouef ont bien mieux réussi leurs reproductions de CC 40100. Quant aux prix, GéGé avec ses 44F se situe à égalité avec Lima et un peu au-dessus des 39F du modèle Jouef. RMF conclut son article en composant le modèle idéal. Il aurait la caisse et l’effort de traction de Lima, les bogies et les pantographes de Jouef et le silence de fonctionnement du GéGé. On peut toutefois trouver cette qualité à ce dernier, maigre consolation !

Une rame Paris-Bruxelles entre en gare. Si les voitures sont très correctes, la silhouette de la CC 40100 est bien trop trapue pour être réaliste.

Le gabarit hors échelle de la CC 40100 GéGé (au centre) dessert totalement le modèle.

La cause en est encore le gros moteur GéGé qu’il faut loger. Notez la transmission par courroie, technique universelle de Gégé appliquée aussi sur la CC 4101.

Les voitures de la rame Paris-Bruxelles-Amsterdam (PBA) sont, par contre, tout à fait acceptables. Elles sont cette fois légèrement raccourcies (moins que le modèle Jouef). Mais la gravure est en net progrès par rapport aux productions antérieures. Les voitures bénéficient d’aménagements intérieurs avec la reproduction des cloisons en verre. Ces voitures sont supérieures aux modèles Jouef ou même Lima. La caisse de la voiture A8 sera réutilisée pour la rame Mistral. Le fourgon générateur, quant à lui, sera repris afin de respecter la bonne longueur pour cette rame . Par contre, l’ensemble de ces modèles seront dépassés par les modèles type Mistral de HOrnby-acHO sortis en 1969.

Le catalogue 1965 présente les deux voitures TEE de la rame Paris-Bruxelles-Amsterdam.

La voie se met enfin aux normes de la compatibilité

A partir de 1965, les rails en laiton creux (l’ancienne voie « Traverses ») sont abandonnés pour un profilé en acier plein. Gégé poursuit sa mise aux normes : après l’attelage, la voie est enfin compatible avec le New Rail Jouef, la voie Fleischmann ou les éléments HOrnby-acHO. Les éclisses sont en laiton, pour une meilleure conduction électrique. Par contre, l’acier est sujet à oxydation, et en cela c’est une régression. Cela ne fait pas moins de trois types de voies en cinq ans. Ces errements de la marque, à la recherche de sa voie idéale, représentent une grosse dépense en outillage, ce qui n’est pas fait pour améliorer la rentabilité. Signalons que des moteurs d’aiguillage démontables permettent une motorisation et que des pupitres de commande pour deux aiguilles sont disponibles.

La nouvelle voie à profilé en acier plein apparue en 1965. A gauche, l’aiguillage électrique, le pupitre de commande et une bobine de câble. Au fond, les deux types de boîtes, les dernières versions étant avec lucarne transparente.

Les trois types d’aiguillages : de gauche à droite, les voies « sécurité » «Traverses » et « universelle ». Trois types de voies en 5 ans, c’est beaucoup d’investissement.

Une rame Capitole prometteuse

Le lancement par la SNCF sur Paris-Toulouse de la rame Capitole, qui roule à 200km/h, ne peut laisser GéGé insensible. Comme Jouef, Lima ou Märklin, la marque veut se l’approprier. La surprise apparaît, dans l’urgence, pour Noël 1967 avec un coffret éponyme. La BB 9240 est reprise, affublée d’une plaque Capitole à l’avant. L’immatriculation n’est pas changée, alors qu’en réalité seules les BB 9281, 88, 91 et 92 sont peintes en rouge et affectées à ce noble service. Les voitures, quant à elles, sont entièrement nouvelles et pas moins de trois modèles sont disponibles pour reconstituer fidèlement la rame. : 1ière classe A9, restaurant et mixte fourgon A7. A noter les très belles plaques latérales « Capitole » avec des lettres en relief soulignées de peinture dorée. Dans la foulée de sa rame Capitole, GéGé sort logiquement les voitures UIC (Union Internationale des Chemins de fer) qui lui ont servi de base. On retrouve une version verte des voitures 1ière classe et mixte fourgon. Ces versions sont cependant décevantes, avec une teinte verte non conforme. A tout cela s’ajoute une version voiture-lit CIWL totalement fantaisiste. Par rapport aux voitures Capitole c’est une régression. Il y a toutefois une voiture qui ne déçoit pas, c’est la très belle Vru restaurant qui est bien mieux réussie que celle de Jouef. Montée sur bogies Y 26, inscription et décoration correspondent pour cette voiture à une véritable approche du modélisme.

Le catalogue 1968 annonce la nouvelle rame Capitole. La BB 9200 est représentée de manière bien plus flatteuse que la réalité. La rame est annoncée, de manière racoleuse, pour 250km/h, soit 50 de plus que la réalité.

Les voitures UIC marquent une régression de Gégé par rapport aux voitures Capitole, avec des décorations fantaisistes (comme la CIWL) ou des couleurs non conformes.

La rame Capitole, avec en tête la voiture A7 mixte fourgon, stationne en gare Gégé.

GéGé produit les voitures les plus fidèles du moment.

Les premières rames Capitole aptes aux 200 km/h, en 1967, sont composées en général de 7 voitures de 3 types différents. On retrouve la voiture A9 de première classe à compartiments. Il y a aussi des voitures mixtes A7D avec un local à bagages fermé par un volet roulant. S’ajoutent des voitures-restaurants Vru qui troquent leur livrée classique contre celle du Capitole. Or une marque crée la surprise en 1968, en proposant les 3 types de voitures : c’est GéGé. Concurrente de Jouef sur le segment du train jouet depuis 1959, on ne l’attend pas sur le terrain du modélisme. Ces voitures disposent d’inscriptions fines, d’un aménagement intérieur et de plaques latérales « Capitole » rapportées en relief avec des lettres or. La BB 9240 GéGé qui accompagne ces voitures est moins convaincante et n’attire pas les amateurs. Aussi, en 1968 Loco Revue leur conseille de composer leur rame Capitole d’une BB 9200 HAMO (version 2 rails continu de la BB Märklin) et de voitures GéGé.

La magnifique couverture de Loco Revue de décembre 1974, la première en couleur, met en valeur les couleurs du Capitole dans un paysage des Pyrénées.

GéGé a décliné les 3 types de voitures Capitole. Elles sont très belles, mais la BB 9200 est dépassée avec son aspect « haute sur patte ».

La CC 6501 en guise de chant du cygne

Cette locomotive sera la dernière sortie par GéGé en 1971. Elle représente un net progrès avec un gabarit un peu plus conforme, quoique toujours trop haut sur pattes. A nouveau, la ligne de toiture et les mains montoirs sont rapportées. La ligne bien plus élégante mais les inscriptions sont par contre, carrément absentes. C’est le chant du cygne de GéGé. Ce modèle de motrice sera peu diffusé, concurrencé également par le modèle Jouef (pas forcément mieux réussi, mais au gabarit exact)

Le chant du cygne de GéGé dans le domaine du train miniature avec la CC 6500, élégante, mais dépourvue d’inscriptions. Elle fait face à la CC 6500 Jouef, presque moins bien réussie. La version de TAB, à l’arrière-plan, est hors concours, nécessitant un budget bien plus important.

Le nouveau Mistral 69 derrière la 65000

La SNCF obtient le label TEE (Trans Europ Express) pour son Mistral à partir de 1964. Les critères de confort et de qualité sont reconnus par l’administration européenne. Les voitures Mistral 56 se voient dotées du bandeau rouge avec les lettres en laiton jaune « Trans Europ Express ». Mais le progrès avance pour ce qui concerne les voitures, et en 1962, la société Carel et Fouché avait produit des voitures de haut niveau pour la liaison TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam (PBA). De ce type de voiture va découler le nouveau Mistral 69, année de son apparition. Une nouvelle façon de voyager apparaît avec la formule dite « coach » : un grand compartiment-salon avec de confortables fauteuils disposés de part et d’autre d’un couloir central. C’est une alternative au « chacun pour soi » des compartiments. On retrouve cependant aussi les voitures à compartiments traditionnels, une voiture-bar, une voiture-restaurant et le fourgon générateur indispensable pour la climatisation. Le nouveau Mistral est une ville sur rails, roulant à 160km/h. On y trouve au bar un stand de vente de tabac, journaux, souvenirs etc. Il y a aussi un secrétariat et un salon de coiffure. C’était toute l’ambiance d’un train d’affaires haut de gamme, du même niveau que ce qu’offrait l’aviation concurrente, avec de l’espace en plus. Jouef et Gégé vont reproduire les voitures du TEE PBA à partir de 1964. Si le premier n’ira pas plus loin, Gégé reproduit en 1969 trois types de voitures : une voiture à compartiments, une voiture-restaurant Vru et le fourgon-générateur A4D. Ce dernier n’est pas le même que celui du PBA, il est plus long. Gégé a donc reproduit les deux modèles avec des moules différents. Elles possèdent un aménagement et, en option, un éclairage intérieur. La marque en profite pour sortir des coffrets, au départ avec la vieille BB 9240. Mais en 1970 apparaît la CC 6501, l’engin moteur le plus réussi de la marque. Il n’en fallait pas moins pour proposer un magnifique coffret Mistral en bois, avec 6 voitures et des aiguillages.

Le nouveau Mistral 69 offre un service de qualité.

Les voyageurs sont accueillis par des hôtesses vêtues d’un élégant tailleur rouge signé du couturier Balmain. Ce train s’inspire des codes du transport aérien, le concurrent redoutable.

Un premier coffret Mistral 69, tracté encore par la vieille BB 9240. Il comprend les 3 types de voitures.

Le Mistral prend toute sa splendeur lorsqu’il est tracté par la CC 6500, l’engin moteur le mieux réussi de la marque Gégé.

HOrnby-acHO sort, également en 1969, ses voitures TEE Mistral 69. Ce sont les meilleurs modèles de la marque. Très finement gravées et presque à l’échelle, le toit est finement patiné en gris métal. Les amateurs devront s’en contenter durant plusieurs dizaines d’années, jusqu’à l’apparition des modèles LS model ou Märklin. Pour les tracter, pas de CC 6500, chez Meccano. Il faut faire avec la vieillissante CC 7121, ce qui dessert cette magnifique rame. Et là aussi ces dernières nouveautés marquent la fin d’une firme française de trains miniatures : la production des trains HOrnby-acHO s’arrête en 1973.

Comparaison des deux rames Mistral 69 de Gégé à gauche et HOrnby-acHO à droite. Il faut se contenter de la vieillissante CC 7121 de Meccano pour tracter la magnifique rame TEE Mistral de HOrnby-acHO.

Une gamme de coffrets royalement étendue et variée

GéGé restera toujours le spécialiste du jouet, et les trains miniatures ne font que compléter sa très vaste panoplie d’offres : poupées, dînettes, voitures téléguidées au 1/18ième ou miniatures au 1/43ième, circuits routiers électriques, coffrets de découverte scientifique, motos électriques, jeux de construction en bois, sans oublier les merveilleuses reproductions des sulkys et de leurs chevaux avec le coffret « Grand Prix de Vincennes ». Bien insérer le train miniature dans ces catalogues suppose offrir une vaste gamme de coffrets de départ. Sur ce point GéGé va exceller, offrant une variété incroyable. Ces coffrets étaient aussi destinés à la grande distribution de l’époque : des groupes comme la Samaritaine, la Redoute, le Printemps, etc. Cela part du coffret minimum avec un cercle de rails, deux wagons et un boîtier d’alimentation par pile comme celui de l’Aquilon, pour aller jusqu’à des coffrets plus étoffés comme le Mistral, le Capitole, l’Etendard, l’Etoile du Nord, Paris-Biarritz, etc. Les coffrets possèdent souvent un petit plus avec un aiguillage et un heurtoir, choses que l’on retrouve rarement chez la concurrence. GéGé veut ainsi développer le goût du jeu dès le début. A noter que les derniers coffrets possèdent un intérieur en plastique moulé décoré façon bois. Et à chaque fois, une étiquette « reproduction fidèle SNCF » rappelle au client que son train est inspiré (avec plus ou moins de bonheur) de la réalité.

Page des coffrets l’Aquilon du catalogue 1965 avec les versions à boîtier à pile ou à transformateur.

Le coffret de base ; l’Aquillon en version boitier à piles.

La gamme des coffrets intermédiaires du milieu des années 60 ; ici l’Etendard. De même couleur que le Capitole, loco et voitures sont dépourvues des plaques du célèbre train.

Une spécialité de GéGé pour ses ensembles de haut de gamme reste le coffret bois. Fait de contreplaqué façon hêtre verni, il est constitué de deux volets repliables montés sur charnières. Des loquets permettent le verrouillage pour le transport et une poignée permet de le transformer en valise. Ainsi il est possible de se rendre chez les copains le jeudi pour jouer avec son train GéGé. On retrouve ce mode de conditionnement luxueux pour la version la plus élaborée du Mistral et aussi pour le Double Trafic. Comme Jouef, GéGé développe ce type de coffret avec deux trains, sur deux circuits séparés électriquement.

Que contient ce beau coffret en bois, doté d’une poignée, façon valise ?

C’est un coffret « double trafic » avec un train de voyageurs et un train de marchandises. Ces coffrets avec deux trains sont une spécialité partagée avec Jouef.

Sous le sapin de Noël, le coffret Gégé est un beau cadeau à la fin des années 60.

Une exclusivité, la commande par sifflet

Comme dans les autres domaines, l’électronique fait timidement ses premiers pas dans le monde du train miniature durant les années 60, mais pas les derniers. Le pionnier, c’est bien sûr Jouef, avec sa télécommande. Lego pour sa part se lance dans le train à construire en briques et fonctionnant à pile à partir de 1966. Avec ce système, pas de commande à distance du train possible. Pour compenser ce handicap, Lego lance en 1968 le train commandé à distance au coup de sifflet : une version ludique de la télécommande. Et ce progrès est permis grâce à un système de captage du son et de filtre sur la fréquence. Toujours à la recherche de motifs de jeu, GéGé va emboîter le pas en équipant certains coffrets d’un système similaire baptisé « train électronique ». A la différence de Lego, qui loge le bloc électronique sur le tender de sa locomotive vapeur, GéGé crée un bloc électronique qui s’insère entre l’alimentation et la voie. Les coffrets sont livrés avec un magnifique sifflet de chef de gare. On dit que c’est celui de Montbrison qui servit de modèle pour illustrer sur les brochures ce nouveau dispositif. Il perdure, notamment avec la toute nouvelle CC 6500, jusqu’à fin

Le chef de gare de Montbrison sert d’emblème à la commande électronique des trains au sifflet.

Les derniers atouts des trains GéGé au début des années 70 : la CC 6500 et la commande électronique.

Face à Jouef, GéGé jette l’éponge.

Gégé n’a jamais pu véritablement prendre pied dans le domaine du modélisme ferroviaire, même si certains modèles restent de nos jours dignes d’intérêt. (Les voitures Capitole en sont un exemple). Ses créations ne sont pas d’une grande originalité, et subissent la concurrence de Jouef, HOrnby-acHO ou de Lima qui reproduisent des modèles identiques, mais plus réussis. C’est dans l’indifférence générale que la marque se meurt. La gamme est amputée de certains modèles en 1976. Et en 1977, c’est la disparition totale des trains GéGé. Finalement, en 1979, la marque baisse définitivement le rideau, tous domaines confondus. Ainsi se termine le règne, à Montbrison, d’un géant du Jouet français. Ses trains miniatures laisseront bien des souvenirs dans les esprits des jeunes garçons de l’époque qui ont reçu ces beaux coffrets. Mais chez les modélistes, Gégé n’a pas convaincu. Ses modèles sont peu recherchés et collectionnés de nos jours.

Il n’y aura jamais de locomotive à vapeur chez Gégé, le moteur est trop gros et l’investissement trop important. Pourtant le concurrent direct l’Italien Lima fera l’effort avec sa 141R. Avec son gabarit important, elle s’intègre bien dans le monde des trains Gégé.





TROBY, une marque française oubliée, à la diffusion limitée

Le cas de Troby est particulier. Cette entreprise spécialiste du moulage plastique est installée en Moselle, à Bitche. Elle travaille au début des années 60 en sous-traitance pour les fabricants allemands tout proches, et notamment pour Fleischmann. Lorsqu’elle décide de voler de ses propres ailes, c’est d’abord pour produire des circuits électriques de voitures dénommées « Mille Milles », du nom de la célèbre course sur route organisée en Italie dans les années 50, entre Rome et Brescia. Cela semble marcher et, en 1963, Troby s’attaque, comme GéGé, au marché des trains miniatures à prix démocratique. C’est la chasse gardée de Jouef, bien installé sur ce segment depuis presque une décennie. Mais contrairement à ce dernier, Troby conservera une diffusion régionale, limitée à la région Est (Alsace, Moselle, Champagne, Ardennes). Et tandis que Jouef va évoluer vers le modélisme, ce ne sera pas le cas pour Troby. Sa diffusion restera limitée, souvent assurée par des magasins de type Prisunic ou des bazars. Pas de publicité dans Loco Revue, peu de catalogues : cela restera une marque discrète durant son existence jusqu’au début des années 80.

Un premier feuillet en guise de catalogue. Les amateurs sont pleins d’espoir : ce sont des modèles réels qui sont illustrés.

Le conditionnement des modèles Troby est fait pour les bazars ou les grands magasins.

Les modèles Troby sont sobres, mais la BB 16501 est à l’échelle et pourra servir de base aux modélistes.


La BB 16500 Troby comble un manque sur le marché.


Apparue à la SNCF en 1958, la BB 16500 est une locomotive universelle. Grâce à son double rapport de réduction, elle peut remorquer aussi bien des trains de marchandises que des express. Omniprésente sur le réseau électrifié 25kv, grâce à ses 292 machines, une des plus importantes séries de locomotives électriques de la SNCF. Elles sont toutefois limitées à 140 km/h en raison des mouvements de suspension qui leur vaudront le surnom de « danseuses ».

La BB 16500, vedette des Vies du Rail avec, notamment, Yvette Horner devant la BB 16501.

En modélisme ferroviaire, le premier constructeur à reproduire la BB 16500 sera JEP, en 1959, avec un modèle économique, destiné à relancer la marque. Troby, quant à lui, sort en 1964 son modèle qui se démarque de Jouef, GéGé ou HOrnby-acHO qui reproduisent tous des BB MTE 9200 ou 16000. La motrice est munie de deux pantographes unijambistes, réellement articulés. A part des phares et des vitres de cabine transparentes, aucune autre pièce n’est rapportée sur la carrosserie, pourtant finement gravée. Pour la décoration, rien non plus, si ce n’est une touche de peinture blanche sur les tampons. Pas d’inscription à part celles gravées en relief. Néanmoins, ce modèle est une bonne base de superdétaillage. Ce sera aussi ce modèle qui sera utilisé par le détaillant parisien Clarel pour proposer sa version superdétallée. Viendra ensuite la reproduction de BB 16500 du RMA, fin des années 60, mais dans une toute autre catégorie de prix, puis en 1984 le KIT en métal blanc de Keyer. En 1986, c’est Jouef qui propose un modèle très correct, sous sa forme modernisée en livrée béton. Enfin les reproductions LS. Models et Vitrains, répondant aux exigences actuelles, apparaissent en 2009.

Le plastique de la caisse de la BB 16500 est de facture très brillante. Mais la gravure est relativement fine.

Au cours des années 60, la BB 16500 affronte le modèle JEP rustique et celui du RMA dans une toute autre gamme de prix.

La première rame de Troby, BB 16500 et voiture DEV acier type Forestier.

Des voitures DEV inox et acier en concurrence directe avec Jouef

Du côté des voitures de voyageurs, on retrouve des quasi-clones des produits Jouef : mêmes modèles, même allure, même raccourcissement. On retrouve une DEV acier de type Forestier et une DEX inox. Toutes les deux mesurent 22cm (contre plus de 26cm si la longueur était reproduite à l’échelle exacte). Ces voitures sont montées sur des bogies Y 24 assez conformes. Un aménagement intérieur et des vitrages sont intercalés. La voiture Forestier dispose d’inscriptions jaunes sérigraphiées.

Les DEV acier et inox de Troby à gauche, face à celles de Jouef ; le clonage est plutôt réussi.

Dotée de bogies Y 24 bien reproduits, la DEV acier de Troby (à gauche) imite plutôt mieux son modèle que la version de Jouef (à droite).

Du bon et du moins bien concernant les machines diesel

Pour la suite, Troby va privilégier les locomotives diesel. Un locotracteur Y 9103 apparaît en mars 1964. C’est à nouveau une réponse à Jouef qui possède le même à son catalogue, sorti à la même époque. Le modèle est simplifié à l’extrême, mais les proportions sont cependant mieux réussies que celles du modèle Jouef. Avec ce modèle, la marque dispose d’une petite locomotive pour les coffrets économiques. Le même châssis sera utilisé pour une horrible petite vapeur à deux essieux baptisée 020TX. Pour passer du mode de traction diesel à la vapeur, une bielle est ajoutée. Mais le public préfère largement l’attachante 020 de Jouef. Ce mode de traction restera ensuite unique dans le catalogue.

Le modèle-phare de Troby sorti en 1965, la A1A A1A 68000 fait la une des catalogues.

La concurrence est dure, pour les motrices diesel Troby (au centre). Les modèles A1A A1A 68000 Fleischmann tout métal (à gauche) sont hors concours, et les O60DB HOrnby-acHO reproduisent la forme des « sous-marins » de manière bien plus fidèle.

En 1965, Troby repasse aux choses sérieuses avec ce qui sera son modèle le mieux détaillé, et sans doute le plus réussi, le diesel A1A A1A 68000. Fleischmann a déjà sorti ce modèle en 1964, mais tout en métal et dans une toute autre gamme de prix. Troby reprend sa technique des deux bogies identiques accrochés au toit. Un seul est moteur avec les seuls essieux d’extrémité entraînés. Mais avec ce modèle, Troby fait un bel effort de décoration pour reproduire cette locomotive au design si caractéristique signé par Paul Arzens. On aurait pu croire Troby en route vers le modélisme. Le modèle suivant démentira cette évolution. En 1968 sort une 060DB. Ce modèle a été reproduit successivement par JEP, VB, HOrnby-acHO. Pour ce modèle, Troby réutilise les bogies de sa A1A A1A 68000. Le résultat est catastrophique : une silhouette boudinée, sans rien à voir avec le « Sous-Marin » au look américain du véhicule réel. C’est une reproduction qui ne restera pas dans les annales.

Avec sa peinture bleue deux tons, décorée de lisérés blancs, la A1A A1A 68000 a fière allure et figure comme le modèle Troby le plus proche du modélisme ferroviaire.

Des mécanismes inspirés de Fleischmann et de Lima

Les modèles Troby possèdent tous une mécanique extrêmement simple, prix de revient serré oblige. Il n’y a pas de châssis, les bogies sont suspendus et vissés à la toiture. Le moteur, de type annulaire à aimant permanent, entraîne par des pignons droits, moulés en matière plastique, des roues en laiton décolletées. Il n’y a pas de bandage d’adhérence, ce qui limite la force de traction. La prise de courant est faite, pour chaque polarité, sur un bogie. Une construction simple, mais au final, pour un fonctionnement souple. Le « tout plastique » limite cependant la longévité. Attention à l’échauffement excessif !

Deux bogies constitués de la même pièce de plastique. L’un est équipé du moteur annulaire à aimant permanent.

La mécanique du locotracteur Y 9103 est efficace et souple grâce à sa démultiplication avec des engrenages droits. Un seul essieu est moteur, l’autre est articulé pour un fonctionnement en 3 points du châssis. Le lest est assez généreux.


Une gamme marchandises classique

Troby propose également sa gamme de wagons de marchandises. Ici aussi, la gamme est calquée sur celle de Jouef avec 4 modèles dès 1963 : un couvert type K à porte coulissante, un plat, un tombereau métallique et un wagon-citerne marqué Esso. Si les trois premiers sont relativement bien reproduits, la citerne est plate sur sa partie inférieure car elle est moulée d’une seule pièce avec le châssis. Le couvert existe en couleur verte et marron. Une porte-auto STVA possède la même anomalie que le modèle GéGé : les essieux sont remplacés par des boggies.
Plus original, on trouve un plat long à ranchers assez bien reproduit. Il est disponible avec un chargement de tuyaux ou de bois. Autre modèle, bien plus intéressant, le tombereau métallique à bogies ex Alsace-Lorraine. Aucune autre marque ne l’a reproduit ; le modèle Troby est totalement original.


Où Troby a-t-il bien pu chercher son inspiration pour son wagon-citerne à deux essieux (au premier plan) sorti en 1963 ? Chez Jouef, bien entendu !

Le plat à ranchers est mieux reproduit que celui de Jouef : si les brancards du châssis sont grossiers, du moins ils existent. L’avantage est à Troby, même si les bogies sont de type allemand.

Le catalogue 1965 avec l’ensemble de la gamme : motrices, voitures et wagons.

Les wagons à deux essieux Troby complètent bien une rame Jouef, moyennant quelques inscriptions et des chargements variés.

Les wagons marchandise à deux essieux, tombereau, plat et couvert. Au fond, un modèle de locotracteur Y 9100, version Jouef superdétaillé par Clarel.

. Les wagons marchandise à deux essieux sur le dépliant de 1963.

Des CIWL et un fourgon Sud-est

Pour faire rêver un peu, Troby propose en 1964 deux types de voitures CIWL : une voiture-lit de type UH et une voiture-restaurant. Cette fois, elles sont équipées de bogies de type Miden Deutz, de construction allemande. La décoration est de bon aloi, avec une belle peinture bleue. Les filets et inscriptions sont tampographiés, de couleur jaune. L’ensemble est de bonne qualité, le meilleur de ce que Troby savait faire.

La voiture lit, un beau modèle destiné au trafic international.

Un modèle se distingue nettement de la concurrence, c’est le fourgon pour train de voyageurs Sud-Est à deux essieux Dd2 DEV U 52, sorti en 1965. De bonne facture et presque à l’échelle, il est doté de 4 portes coulissantes. Nombreux sont les amateurs qui l’utilisent comme base pour le détailler. Il faut dire que pour 3 NF (moins de 4 Euros actuels) c’est une affaire. C’est aussi ce que propose le spécialiste parisien Clarel au début des années 70.

Le fourgon Sud-est Troby face à ses concurrents ; au fond le modèle RMA en kit, bien plus coûteux, à droite, le modèle Macket, marque artisanale éphémère du début des années 60.

L’ancêtre, le fourgon Sud-Est de Macket commercialisé en 1957. Cette marque éphémère disparait dès 1960 après avoir sorti ce modèle et des voitures DEV acier.

La CC 40100, la dernière déception !

Si la A1A-A1A 6800 amorçait en 1965 un mouvement de Troby vers le modélisme, il semble qu’après cette date, la volonté de la firme ait été de rester délibérément confinée dans le domaine du jouet. La CC 40100, qui apparaît au début des années 70, est proche de la caricature. Raccourcie, pataude et haute sur pattes, elle n’évoque en rien la machine réelle, racée, fleuron de la SNCF. Comme machine, Troby produira encore un diesel allemand V200 : Bitche étant proche de la frontière, il est tentant de prospecter sur ce marché. Et puis l’histoire s’arrête là, au début des années 1980.

Avec la CC 40100, Troby délaisse définitivement le monde du modélisme.

Des coffrets à destination de la grande distribution

A part un choix limité d’éléments de voie, il n’y jamais eu d’accessoires proposés par cette marque. La cible reste les grands magasins des grandes villes, type Prisunic ou Au Printemps. La gamme des coffrets Troby est très large. Le plus modeste est sans doute le « Diesel Ranger » doté d’un locotracteur Y910. Le « Rural Express » dispose, lui, d’un 020T vapeur. Avec la BB 16500 et deux voitures inox, on trouve le « Transeuropean » ou « l’Edelweiss ». La A1A A1A 68000 tracte le « Blue Arrow » composé d’une voiture- lit et d’un wagon porte-autos STVA. A noter l’existence d’un coffret « Le double trafic » composé de deux trains, s’inspirant ainsi du concept lancé par Jouef et repris par GéGé. La CC 40100 sera, elle, le prétexte pour sortir un coffret TEE. Signalons que, pour les chaînes des grands magasins, on trouve des coffrets démarqués.

Une gravure alléchante pour ce couvercle de coffret « Transazur ». Pourtant la Méditerranée n’est pas le domaine des BB 16500 au cours des années 60. Mais il faut bien susciter le rêve de voyage vers le soleil !

Le coffret « l’international » composé de la BB 16500 et de 4 voitures.

Un coffret sans marque destiné à la grande distribution, avec un prix discount. Les grandes photos qui illustrent les boîtes Troby sont souvent prises en banlieue de Strasbourg sur la ligne en direction de Paris.

La page des alimentations et des coffrets du dépliant 1965.