Maquettes Ferroviaires
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VB la Grande Marque des petits trains

L’assortiment de voie VB, conçu pour les modélistes.

Le système de voie VB, à la géométrie très réaliste, met bien en valeur les beaux modèles français Antal, Rateau ou TAB, de son époque. A la fin de son existence, VB cherchera à adopter le plot, mais sans réussite.

Ce qui caractérise la voie VB c’est sa géométrie qui utilise des grands rayons de courbure, un intervalle entre les voies qui est réduit et des aiguillages à faible angle de déviation, ce qui permet des mouvements de trains particulièrement élégants. C’est une chose rare à cette époque où les fabricants proposent quasi uniquement de la voie à géométrie de type jouet, permettant de construire un réseau sur la table du salon familial. L’autre particularité de la voie VB est d’avoir un travelage isolant, d’abord réalisé en presspahn découpé, puis en plastique moulé. Le ballast métallique est découpé pour laisser passer chaque traverse constituant à l’intérieur un insert. Ce système permet d’isoler électriquement les rails droit et gauche en plus du rail central, il y a donc bien trois conducteurs électriques ; les deux voies peuvent être shuntées par les roues non isolées des locomotives ou des wagons et ainsi constituer un système de télécommande ou de signalisation. La première voie VB est revêtue d’un ballast collé en gravier fin d’origine minérale et date de la fin des années 40. Ce ballast extrêmement réaliste procure un niveau de réalisme qui ne sera plus atteint avant de longues années. Mais ce mode de construction étant sans doute trop long et donc trop coûteux, VB représente ensuite le ballast par une peinture sur la tôle. Ce type de voie plus industriel est largement diffusé en 1948. Le réalisme y perd quelque peu, d’autant que l’aspect du ballast est très variable d’une série à l’autre, ce qui implique d’être vigilant lors de l’association de différents éléments entre eux si vous reconstituez un réseau. La voie VB a également été produite en version deux rails, par la simple suppression du conducteur central au montage. Le Loco Revue du salon de Paris 1948 évoque aussi d’une « nouvelle voie avec rail latéral, tant attendue des vrais amateurs ». Cette voie très spécifique semble avoir été très peu diffusée. En tout cas, elle n’est plus au premier catalogue de 1950. Sans doute trop complexe car elle nécessite au droit des aiguillages une alimentation transférée d’un coté à l’autre de la voie. Le rail latéral était raccordé à la languette centrale pour assurer la continuité électrique entre les éléments.

Les premiers types de voies



VB désire satisfaire la clientèle naissante des modélistes, proposant au début un très beau ballast sur la toute première version.

Le ballast d’origine minérale est collé sur l’âme en tôle emboutie. Les premiers raccordements entre les conducteurs centraux sont en laiton avec un dispositif dissymétrique de verrouillage. Les traverses de cette première version de la voie sont en presspahn embouti.

La voie avec rail latéral qui est très rare. Elle figure sur la couverture du livret de Géo Mousseron sur la construction des trains miniature, édition 1952. Aucune trace par contre dans le catalogue VB 1950, si ce n’est une photo du wagon à bestiaux prise sur ce type de voie.

Un système complet et bien conçu

L’assortiment de voies est complet avec des éléments complémentaires tronqués permettant toutes les combinaisons. Les éléments droits font 224 mm de longueur et sont livrables en tronçons de ½, ¼ , 1/8, 1/7. Les rayons de courbure sont généreux avec 58,5 cm et 53,5 cm. Les éléments courbes sont livrables en tronçons de ½ et ¼ . L’intervalle entre les voies est réduit à 5 cm entre les axes et 1 cm entre le ballast de deux voies parallèles. L’angle des aiguillages est réduit à 16° ce qui permet des mouvements de trains particulièrement élégants, chose rare à cette époque. Un croisement était disponible, avec le même angle que les aiguillages, mais au grand regret des amateurs, il n’y eut jamais de traversée jonction double en voie VB, ce qui en aurait beaucoup augmenté les possibilités de tracé.


L'assortiment de voies illustré dans le catalogue 1958. Il existe deux diamètres, de 107 et 117 cm ; les aiguillages sont à faible angle de déviation et des éléments complémentaires tronqués permettent toutes les combinaisons.

Le même assortiment photographié. La voie VB a fait la réputation de la marque, elle est du type trois rails isolés.

Page du catalogue VB 1957 qui présente deux circuits avec leurs compositions et le schéma de raccordement des aiguillages disposant de fiches triples.

Les multiples versions de rails spéciaux ; à sectionnements, coupures, raccordements électriques, pédales de contact ou élément dételeur électromagnétique à commande à distance.

Les aiguillages évoluent au cours du temps

Le premier type d’aiguillage avec moteur amovible que l’on peut placer de chaque côté en fonction des besoins. La commande manuelle s’opérait grâce à un petit signal rond amovible. A gauche, des aiguillages de marque Tourelle, le grand concurrent de VB dans le domaine de la voie, et qui avait l’avantage d’offrir un plus grand choix de types d’appareils (TJD, aiguillages courbes, symétriques, …).

Le système de démontage des moteurs sur le premier type d’aiguillage à l’arrière-plan et le dernier type avec câble et fiche tripolaire qui vient se brancher directement sur les boitiers de commande.

L’évolution des aiguillages VB ; à gauche le premier type à moteur amovible datant de la fin des années 40, au fond, le deuxième type à partir de 1952 à petit moteur et fiches de raccordement électrique intégrées au ballast, et au premier plan, le modèle final avec cablâge aboutissant sur une fiche triple. Le catalogue montre les combinaisons possibles avec le croisement. Sur les nouveaux moteurs, la commande manuelle s’opère grâce à une lanterne factice marquée.

La description des aiguillages VB dans les catalogues 1950 en haut, puis 1952 en bas avec le texte énumérant les 5 avantages des nouveaux moteurs.

L’illustration en couverture du catalogue 1954 montre les possibilités d’encastrement entre les aiguillages et les croisements permettant un plan de voie réaliste pour l’époque. A noter l’utilisation du premier type d’aiguillage qui n’est déjà plus commercialisé à cette époque (Le catalogue 1950 avait une couverture identique).

Tout le plaisir du collectionneur est dans cette reconstitution plus de 60 ans plus tard et en y ajoutant du décor, de ce qui fut le fleuron du modélisme ferroviaire français. On se plaît à rêver de ce qu’aurait pu devenir VB de nos jours, si comme Märklin en Allemagne, la firme avait survécu.

Si VB n’a jamais proposé de pont tournant, Cropsy s’est chargé d’en produire un adapté à sa voie comme le montre cette publicité dans Loco Revue N° 64 d’octobre 1948.

La plaque tournante Märklin s’adapte bien à la voie VB et c’est celle qui sera utilisée par de nombreux amateurs.

Le rayon des aiguilles VB correspond au diamètre des voies extérieures, ce qui permet de créer des entrées de gares réalistes. Les bretelles de raccordement sont très faciles à implanter avec les moteurs entre les voies.

Un défaut de la voie VB était le manque de constance des couleurs du ballast. La boîte d’aiguillage a été achetée à « La Cigogne d’Alsace » à Colmar, au prix de 2775 francs (66 euros actuels).

Le premier type de heurtoir au fond est constitué de profilés en rails soudés. Le deuxième, apparu en 1952, reproduit un heurtoir standard en béton de la SNCF en plastique moulé, peint au début, puis monté brut de démoulage ensuite, visible au premier plan. Au centre, des heurtoirs Cropsy « type ciment » réf 535 selon les tarifs de l’époque et qui sont adaptables à la voie VB. Diverses fabrications artisanales peuvent se trouver sur les bourses comme ici le buttoir en bois adapté sur un tronçon de voie.

Avec la voie VB, Disque Rouge commercialise des signaux mécaniques ou lumineux adaptés au système monté sur socles métalliques assortis. Ainsi tout un ensemble cohérent et de construction française est à la disposition des amateurs. Heureuse époque !

La gamme de la marque « Le Disque Rouge » illustrée dans le catalogue « au Pélican » de 1952 qui complète harmonieusement la gamme de voie VB.


Le signal commandé par un relais est directement monté sur un élément de voie VB avec une section de commande au rouge afin de simplifier le câblage et les coupures. Autour, d’autres accessoires Disque Rouge.

Pour réduire le prix de revient et baisser les coûts, VB simplifie le système d’attache des rails qui ne seront plus fixés que toutes les 6 traverses.

La voie qui compose les réseaux marquants de l’époque.

Si l’on relit les revues de l’époque, l’on s’aperçoit que la majorité des réseaux décrits datant des années 40 et 50 sont constitués de voie VB. Dans les belles installations qui ont marqué leur époque, il faut noter le réseau de démonstration du stand commun à VB et à Miniatrain de la Foire de Paris 1948. Il mesurait 4m x 2m et était composé de voies et wagons VB, de bâtiments Cropsy et de locomotives Miniatrain. Il deviendra ensuite le réseau de démonstration du magasin « Au Mousquetaire » au 108 boulevard de Courcelles à Paris 17 ième. Autre installation marquante, le réseau du RMA qui reproduisait une portion de Savoie. En 1950, Louis Lavigne rachète un cabaret dénommé « La Rumba » situé Cité du Midi, 48 Boulevard de Clichy près de Montmartre, pour y installer un immense réseau ; le Réseau Miniature Amateur. Vedette des années 50, le réseau de plus de 100 m2 fait appel à 233 m de voie VB. Les wagons de marchandises (environs 250 annoncés dans le Loco Revue de février 1952) sont pour une grande part d’origine VB. Au milieu des années 50, le réseau pouvait se visiter et même se piloter. Il connaissait une forte fréquentation dans le Tout-Paris de l’époque ; c’était l’équivalent actuel du Miniatur Wunderland de Hambourg ou du Mini World de Lyon. En sus de ces réseaux célèbres, il y eut bien d’autres amateurs dans de nombreux foyers qui utilisèrent le système de voie VB à leur grande satisfaction.

Le réseau de démonstration du stand commun à VB et à Miniatrain de la Foire de Paris 1948 qui sera ensuite le réseau du magasin « Au mousquetaire ». Il est décoré de bâtiments Cropsy. On aperçoit les aiguillages VB de première génération.

Vedette des années 50, le réseau du RMA fait aussi appel à la voie VB et fait rêver les enfants. Les wagons sont pour une grande part d’origine VB, alors que les moyens de traction sont d’origine Märklin, Antal ou TAB.

Le réseau du RMA reproduisait une portion de la Savoie et il connaissait une forte fréquentation dans le Tout-Paris de l’époque, on pouvait même diriger soi-même les trains.

Comme beaucoup d’autres réseaux d’amateur, celui de l’acteur Bernard Blier qui est ici présenté dans la Vie du Rail spécial Noël 1957, est composé de voies et de wagons VB.

Le brevet de la voie VB vendu à Märklin qui y adapte le plot

En 1949, Märklin achète à VB le brevet de son système de voie. La marque veut percer sur le marché américain qui n’accepte pas un conducteur central aussi visible. Aussi Märklin décide d’adapter le plot , utilisé par certains amateurs, au systéme de voie VB. Le 16 mai 1953, Märklin dépose le brevet N° 1028027 auprès de la Deutschen Patentamtes sur le système à plots. Officiellement ce sont les Dipl.-Ingénior Max Thiem et Fritz Rieker junior qui apposent leurs noms pour cette invention qui restera dans la postérité du modélisme ferroviaire. La doyenne du train miniature commercialise en 1953 sa fameuse voie modèle réf 3900, 3800. Le plot est quasiment invisible car incrusté dans les traverses en plastique. Il nécessite l’utilisation de skis pour capter le courant et donc d’adapter les locomotives, mais il permet de conserver les avantages du système à trois rails. Cette voie est très belle, mais aussi très complexe à fabriquer et donc très chère. Ce sera un échec commercial et elle ne survivra pas au catalogue Märklin de 1956 où elle sera remplacée par la très démocratique voie M entièrement en tôle mais avec une géométrie type jouet beaucoup moins réaliste.

Le catalogue Märklin 1955 présentant la voie modèle à la géométrie totalement identique à celle de VB.

Comparaison entre la voie VB, et la voie modèle Märklin. Le troisième rail s’est volatilisé grâce au plot.

Comparaison entre les éléments de voie VB et Märklin modèle. La filiation est évidente, le plot est un plus à l’avantage de la marque allemande. Les lanternes d’aiguillages sont lumineuses chez Märklin.

Une entrée de gare version voie modèle Märklin à belle allure grâce à l’absence de conducteur central. A comparer avec la gravure du début de ce chapitre. Hélas VB ne saura pas négocier le virage pour supprimer le conducteur central.

Les plots sont discrets et n’altèrent plus l’atmosphère que le modéliste peut créer en cette fin des années 50.

Le dessous des éléments permet de se rendre compte de la complexité de fabrication avec les inserts en plastique. Märklin envisagea la fabrication d’une traversée jonction double ; un prototype a été construit, mais jamais commercialisé.

La voie courbe VB était écrasée sur un côté pour reproduire le dévers. Ce point n’a pas été repris par Märklin. Notez les détails remarquables de la vigie serre- frein du wagon à bestiaux N°25 de VB, à droite.

Le devers de la voie VB donne un effet spectaculaire et très ferroviaire. Un plus, dommage qu’il y ait ce troisième rail.

La mystérieuse voie à plots qui devait être révolutionnaire !

En 1959, retournement de l’histoire, VB emboîte le pas à Märklin et adopte à son tour une voie à plots, mais de construction plus économique. Elle devait être révolutionnaire, sans éclisse, avec des pinces amovibles pour assurer le raccordement entre les éléments. L’astuce consistait en une jonction verticale qui devait permettre le remplacement facile d’un tronçon si nécessaire. La voie à plots VB devait être plus économique que la voie classique ; l’équivalent de 3,6 Euros pour un élément droit contre 4,95 le même élément en trois rails. Elle avait un rayon plus serré, sa géométrie était totalement différente de la voie classique de la marque. Elle en conservait toutefois les traverses en plastique, les plots étaient reliés électriquement au ballast en tôle et donc aux pinces de raccordement amovibles. L’on peut retrouver dans les pages du N° 187 de Loco Revue de juillet-août 1959 une publicité complète qui vante les mérites de la nouvelle voie à plots VB et explique son mode de montage avec un schéma permettant de visualiser le type d’emboîtement. Il était très déroutant pour l’amateur de l’époque qui avait pris l’habitude d’assembler les éléments en les glissant horizontalement les un contre les autres. A notre connaissance, cette voie n’a pas eu de suite et les aiguillages de cette technologie, bien qu’annoncés, n’ont jamais été commercialisés. Seul un élément droit de longueur 182,5mm, un élément courbe (16 éléments pour un cercle de 476, 5mm de rayon au centre) ainsi qu’un élément de transition avec la voie trois rails de VB ont laissé des traces dans l’histoire. Mais pour la voie VB à plots, ce sera un échec ; la précision de fabrication n’était pas au rendez-vous et des lacunes importantes apparaissent entre les éléments de voie. Elle a sans doute été réellement peu installée sur des réseaux, faute de disposer d’un assortiment complet, et elle devait sans doute être la source de nombreux déraillements. De toute façon, la marque VB est rachetée par Triang, qui ne donnera pas suite. Bien des années plus tard, Märklin reprendra le principe d’une voie sans éclisse, avec un mode de jonction solide, mais avec la fiabilité que procure la précision du moulage plastique. Ce sera la voie C apparue dans les années 90, que nous connaissons tous et qui rencontre un franc succès de nos jours.

En 1959 VB commercialise à son tour une voie à plots, de construction plus économique. Elle devait être révolutionnaire, sans éclisse, avec des pinces amovibles de raccordement entre chaque élément.

Visualisation du mode d’emboîtement. L’astuce consistait en une jonction verticale qui devait permettre le remplacement facile des éléments. Comme on l’aperçoit à l’arrière-plan, la précision de fabrication n’était pas au rendez-vous, source de déraillement.

Bien des années plus tard, Märklin reprendra le principe d’une voie sans éclisse, mais avec la précision du moulage plastique, ce sera la voie C des années 90, qui connaît un franc succès aujourd’hui.

Le N° 187 de Loco Revue de juillet aout 1959 vante les mérites de la nouvelle voie à plots VB et en explique le montage.

La voie classique VB a aussi été produite en version deux rails, à gauche sur la photo. On voit que la voie à plots avait un rayon plus serré de 50 cm par rapport à la voie VB classique. Les plots étaient reliés électriquement au ballast en tôle et donc aux pinces de raccordement amovibles.

Face à la concurrence française.

Les voies Française des années 50/60. De gauche à droite, la première voie Jouef à ballast, la voie Tourelle à traverse bois, la voie VB deux rails à ballast minéral collé, la voie VB trois rails, la même en version deux rails, la voie à plot VB, la voie JEP à traverse plastique, la voie Jouef New rails à profilé laiton, la voie HOrnby-acHO, la voie Tourelle TP à traverse béton et enfin, la voie PECO code 100 flexible. C’est cette dernière qui comblera les amateurs jusqu’à nos jours. Au fond les aiguillages Jouef voie ballastée et New rails.

Finalement, après l’expérience de la voie à plots, celle-ci disparait du tarif 1960 et la voie trois rails reprend le dessus avec une version dérivée à deux rails. Il faudra s’habituer à contempler de beaux décors tout en tolérant ce troisième rail, si irréaliste soit-il.